Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 6.djvu/444

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
444
LES JOURNÉES DE SEPTEMBRE

digne de la brutalité du soudard saxon qui l’inspira. Sans doute espérait-il terroriser les volontaires auxquels il n’avait pu résister en rase campagne et venger sa défaite au détriment de la population. S’il avait compté sur la terreur, il s’aperçut bientôt qu’il s’était trompé. Pas un drapeau blanc ne se montra au milieu des drapeaux tricolores qui flottaient de toutes parts. Le 28, Rogier signait avec Chassé un armistice indéfini. Les Hollandais conservaient la citadelle et les forts du Nord ; la ville était abandonnée aux Belges.

Cet armistice clôt la phase militaire de la Révolution. Elle était arrivée à son but : l’affranchissement du sol national. Elle ne se proposait pas autre chose. Le gouvernement hollandais craignit vainement de voir les Belges profiter de leurs succès et de sa faiblesse pour envahir les provinces du Nord : ils n’y songèrent pas. Déjà les volontaires, considérant leur tâche comme terminée, regagnaient spontanément leurs foyers. Ils avaient combattu pour la liberté non pour la conquête, et il leur suffisait d’avoir repoussé l’armée royale au delà de la frontière. Sauf la citadelle d’Anvers, Maestricht et Luxembourg où elle tenait encore garnison, elle avait maintenant évacué toutes les places. La séparation était chose faite. Le refus du roi de l’accomplir quand il en était temps encore avait rendu la guerre inévitable. Au reste, cette guerre n’avait pas été dirigée contre les Hollandais. Nulle haine nationale ne soulevait les Belges contre leurs voisins au Nord dont les puissances avaient prétendu faire leurs compatriotes. C’est le royaume des Pays-Bas, ce n’était pas la Hollande qui était l’ennemi.

III

En rompant avec le roi, les Belges rompaient en même temps avec l’Europe. Leur révolution fut le premier coup porté à « l’édifice construit par les puissances alliées en 1815 ». Elle l’ébranlait d’autant plus dangereusement qu’elle en mettait tout à la fois en péril les résultats et les principes. Non seulement elle renversait la barrière si soigneusement élevée contre