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ii
PHÈDRE

(p. 92, n. 1 et Notice, p. vii), la condition qui permettrait au même homme d’exceller également dans l’art tragique et l’art comique. En tout cas ce qui, d’après le Phèdre, fait l’infirmité de l’art de la parole, en général et tel qu’il est présentement constitué, c’est justement l’ignorance où il est du rapport de ses moyens d’action avec la nature vraie des âmes humaines.

Authenticité et date de la composition.

L’authenticité du Phèdre n’a pas plus besoin d’être discutée que celle du Banquet. Elle est garantie, d’abord par plusieurs références aristotéliciennes, soit avec le titre seul, soit avec le nom seul de Platon[1], ensuite par la tradition unanime de l’Antiquité. La question délicate, c’est de savoir à quelle époque Platon l’a écrit. Il y a dans ce dialogue une telle allégresse de vie, une si grande fraîcheur de jeunesse qu’on a pendant longtemps ajouté foi à une allégation rapportée par quelques écrivains anciens d’époque tardive[2], que le Phèdre serait le premier ouvrage de Platon, antérieur même, disent certains, à la mort de Socrate et datant de sa vingt-cinquième année environ. Cette opinion, à la vérité, avait rencontré des adversaires ; mais ce sont les travaux des Stylisticiens qui l’ont le plus fortement ébranlée. On ne peut dire cependant qu’ils lui aient porté le coup de grâce et qu’il y ait rien d’entièrement décisif dans les résultats auxquels a conduit la comparaison de la langue du Phèdre avec celle de dialogues que leur parenté stylistique avec les Lois a fait reconnaître eux-mêmes comme

  1. Pour le premier cas : Rhét. III 7 fin (à propos de l’emploi ironique de la langue de la poésie). Pour le second : Top. VI 3, 140 b 3 sq. ; Métaph. Λ 6, 1071 b, 31-33, 37 sq. À ces textes, les seuls que mentionne Bonitz (Index 598 b, 25 sqq.), il faut sans doute ajouter deux autres passages, qui semblent viser le Phèdre mais où Platon n’est même pas nommé : Phys. VIII 9, 265 b, 32-266 a, 1 et De an. I 2, 404 a, 20-25.
  2. Diogène Laërce III 38 ; Hermias, Commentaire du Phèdre p. 9, 14-19 Couvreur ; Olympiodore (le Jeune) Vie de Platon (vol. VI du Platon d’Hermann, p. 192 s. med.), témoignage qui se confond avec celui de la Scholie à 227 a (Hermann p. 262), d’après le commentaire sur le Premier Alcibiade ; car la Vie de Platon est elle-même extraite de ce commentaire (cf. l’éd. de ce commentaire par Creuzer II, p. xviii, n. 2 et p. 2). Cf. Notice p. lix.