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HIPPARQUE OU L’HOMME CUPIDE

Socrate. — Il te semble donc, apparemment, qu’il y a un gain bon et un gain mauvais.

Le disciple. — Oui.

Socrate. — Eh bien ! je t’abandonne cela : qu’il y ait donc, d’une part, un gain bon et, de l’autre, un gain mauvais. Mais, de ces deux, le bon n’est pas plus gain que le mauvais, n’est-ce pas ?

Le disciple. — Que me demandes-tu ?

Socrate. — Je vais te le dire. Il y a de la bonne nourriture et de la mauvaise ?

bLe disciple. — Oui.

Socrate. — L’une est-elle donc plus nourriture que l’autre, ou toutes deux le sont-elles également et ne diffèrent-elles en rien l’une de l’autre du fait qu’elles sont nourriture, mais seulement du fait que l’une est bonne, l’autre mauvaise ?

Le disciple. — Oui.

Socrate. — N’en est-il pas de même de la boisson et de toutes ces autres choses qui, tout en ayant la même nature, se trouvent néanmoins les unes bonnes, les autres mauvaises ? Évidemment, elles ne diffèrent en rien l’une de l’autre par ce qu’elles ont en elles d’identique. C’est comme pour l’homme : ccelui-ci est bon, celui-là mauvais.

Le disciple. — Oui.

Socrate. — Mais aucun homme, j’imagine, n’est plus ou moins homme que l’autre, ni le bon plus que le mauvais, ni le mauvais moins que le bon.

Le disciple. — Tu dis vrai.

Socrate. — N’en jugerons-nous pas de même du gain, et ne sont-ils pas également gain, le mauvais comme le bon ?

Le disciple. — Nécessairement.

Socrate. — On ne gagne donc pas plus à faire un gain honnête ni plus à faire un gain déshonnête : aucun de ces deux gains ne nous paraît être plus gain l’un que l’autre, dnous l’avons reconnu.

    Républ. I, 333 b ; II, 374 c. — Le terme ἀναθέσθαι s’emploie pour les joueurs qui ont lancé maladroitement les dés et à qui on permet de reprendre leur coup. — Cf. Antiphon : ἀναθέσθαι δὲ ὥσπερ πεττὸν τὸν βίον οὐκ ἔστιν (Diels, Die Fragmente der Vorsok. II, 80 Β, 52). Se dit, par métaphore, d’une opinion que l’on retire (cf. Protagoras, 354 e ; Gorgias, 461 d, 462 a).