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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.


Le Premier est la puissance du mouvement et du repos ; aussi est-il supérieur à ces deux choses. Le second principe se rapporte au Premier par son mouvement et par son repos : il est l’Intelligence, parce que, différant du Premier, il dirige vers lui sa pensée, tandis que le Premier ne pense pas. Le principe pensant est double parce qu’il comprend la chose pensante et la chose pensée] ; il se pense lui-même, et, par cela même, il est défectueux, parce que son bien consiste à penser, non à subsister (οὐϰ ἐν τῇ ὑποστάσει). » (Enn. III, liv. IX, no 7, p. 245.)

Citons encore le passage suivant de Victorinus :

« Quelques-uns ont dit que Dieu est un et tout, et n’est pas un[1]. Affirmer que Dieu est un et tout et n’est pas un (car il est le principe de tout), c’est déclarer que Dieu est le père et le principe de toutes choses. Par cela même que Dieu n’est pas un, il est d’autant mieux toutes choses, parce qu’il est la cause et le principe de tout, et qu’il est toutes choses en toutes choses… Quand on dit que toutes choses sont dans l’Un, ou que l’Un est toutes choses[2] ; quand on dit que l’Un est toutes choses et en même temps n’est pas un, n’est pas toutes choses : alors Dieu devient infini, inconnu, incompréhensible, inconcevable, il devient véritablement ἀοριστία, (c’est-à-dire infinité, indétermination[3]. En effet, il devient l’être de tout, la vie de tout, l’intelligence de tout ; il est ainsi un, de telle sorte que sa conception n’admet aucune différence. Mais, d’un autre côté, il n’est pas un, sous ce rapport qu’il est le principe de toutes choses, par conséquent, le principe de l’unité même. Par là nous sommes forcés de dire de Dieu que son être, sa vie, son intelligence, sont incompréhensibles ; et non-seulement que son être, sa vie, son intelligence, sont incompréhensibles, mais encore que ces choses paraissent ne pas exister en lui, parce qu’il est supérieur à tout. Il s’ensuit qu’on l’appelle ἀνύπαρϰτος, ἀνούσιος, ἄζων, c’est-à-dire sans existence, sans essence, sans vie, non par στέρησις, c’est-à-dire par privation, mais dans un sens transcendant[4]. Car toutes les choses que le langage peut nommer sont au-dessous de lui. De là vient qu’il n’est pas ὄν (être), mais πρὸ ὄν (antérieur à l’être)[5]. » (Adv. Arium, IV, p. 286.)

  1. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § XL ; t. I, LXXXI.
  2. Voy. Plotin, Enn. III, liv. IX, no 4, p. 243.
  3. Voy. Enn. II, liv. IV, § 15 ; t. I, p. 220-221.
  4. Voy. le morceau du P. Thomassin que nous avons cité ci-dessus, p. 249, note I, et dans lequel ce savant théologien explique le véritable sens de cette doctrine.
  5. Voy. le passage d’Euloge que nous avons cité ci-dessus, p. 246, note 2.