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QUATRIÈME ENNÉADE, LIVRES III, IV, V.


sage où saint Augustin se sert, pour expliquer l’union de la nature divine et de la nature humaine dans la personne du Christ, de la théorie néoplatonicienne sur l’union de l’âme et du corps, comme le fait Némésius dans le passage que nous avons cité plus haut (p. 586) :

« Sic autem quidam reddi sibi rationem flagitant, quomodo Deus homini permixtus sit, ut una fieret persona Christi, quum hoc semel fieri oportuerit, quasi rationem ipsi reddant de re quæ quotidie fit, quomodo misceatur anima corpori, ut una persona fiat hominis. Nam, sicut in unitate personæ anima unitur corpori, ut homo sit ; ita in unitate personæ Deus unitur homini, ut Christus sit. In illa ergo persona mixtura est animæ et corporis ; in hac persona mixtura est Dei et hominis : si tamen recedat auditor a consuetudine corporum, qua solent duo liquores ita commisceri ut neuter servet integritatem suam, quanquam et in ipsis corporibus aeri lux incorrupta misceatur[1]. Ergo persona hominis mixtura est animæ et corporis ; persona autem Christi mixtura est Dei et hominis.

    tunc vero ingenti quadam et incredibili fiducia pergit in Deum, id est in ipsam contemplationem veritatis et illud propter quod tantum laboratum est, altissimum et secretissimum præmium. 3o Sed hæc actio, id est appetitio intelligendi ea quæ vere summeque sunt, summus aspectus est animæ, quo perfectiorem, meliorem rectioremque non habet. Sextus ergo erit iste gradus actionis : aliud est enim mundari oculum ipsum animæ, ne frustra et temere aspiciat et prave videat ; aliud custodire atque firmare sanitatem ; aliud jam serenum atque rectum aspectum in id quod videndum est dirigere (De Quantitate animœ, 33.) Toutes les idées que saint Augustin développe dans ce morceau sont empruntées à l’Enn. I, liv. II, § 4 et 5. Les dernières lignes, par exemple, rappellent cette pensée de Plotin (t. I, p. 57) : « il faut, après avoir purifié l’âme, l’unir à Dieu ; il faut la tourner vers lui. Qu’obtient l’âme par cette conversion ? l’intuition de l’objet intelligible, etc. » De même, dans ces lignes : « Aliud est efficere, aliud est tenere puritatem ; et alia prorsus actio qua se inquinatam redintegrat, alia qua non patitur se inquinari, » il est facile de reconnaître cette phrase de Plotin (p. 56) : « Se purifier est inférieur à s’être déjà purifié : car la pureté est le but que l’âme a besoin d’atteindre, etc. » Nous avons déjà cité ci-dessus (p. 544-547) un passage d’un autre écrit de saint Augustin dans lequel on retrouve toute la théorie des vertus purificatives et des vertus intellectuelles telle qu’elle est exposée dans le livre II de l’Ennéade I.

  1. Saint Augustin fait allusion ici à la différence que Plotin établit entre le mélange et la mixtion. Selon ce philosophe, l’âme ne saurait former un mixte avec le corps, comme l’enseignaient les Stoïciens, parce que dans la mixtion les éléments perdent chacun leurs qualités pour se combiner en constituant un tout homogène (Voy. t. I, p. 213-214). L’âme cependant peut se mélanger avec le corps, c’est-à-dire lui être unie, mais en conservant sa nature : « En