Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/338

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cente et qui devrait être à l’index de toutes les familles.

Tout écart produit par l’amour, en quelque sens que ce soit, est mauvais, et selon moi immoral. Il trouble l’âme, amollit le caractère, fait perdre la liberté ; c’est une offense envers soi-même, envers le sexe et envers la société. Pour toutes ces raisons, je ne fais pas de différence entre les romans honnêtes et les ouvrages obscènes ; je les réprouve tous également. Et l’homme qui, sous prétexte d’innocence, inspire un amour de ce genre à une jeune personne, est aussi coupable à mes yeux que celui qui abuse de l’enivrement de ses sens : pour l’un comme pour l’autre, je voudrais que la loi déclarât qu’il y a rapt de séduction…

Cette longue crise finie, je me crus libre ; mais c’est alors que je fus assailli par le diable qui taquinait saint Paul, et, je puis le dire, à mon extrême déplaisir. Le diable, qui si longtemps m’avait brûlé du côté du cœur, maintenant me rôtissait du côté du foie, sans que ni travail, ni lectures, ni promenades, ni réfrigérants d’aucune sorte, pussent me rendre la tranquillité. J’étais victime de la réaction des sens contre l’esprit. Mes principes, je prenais mon platonisme pour des principes, ayant eu le temps de se fixer, une scission douloureuse s’opérait en moi entre la volonté et la nature. La chair disait : Je veux ; la conscience : Je ne veux pas. Allais-je me démentir, ou me consumer à nouveau dans cette mystification à laquelle je ne voyais pas de terme ? Combattre l’amour physique par l’amour platonique, cela ne se fait pas à commandement ; celui-ci épuisé, l’autre éclatait dans toute sa violence. J’ai lu depuis l’histoire d’Abailard : le pauvre homme en était arrivé là quand il fit la connaissance d’Héloïse.

Chez le séminariste, la religieuse, le zèle de la religion et la ferveur du mysticisme produisent le même effet que