Page:Réveillaud - Histoire du Canada et des canadiens français, de la découverte jusqu'à nos jours, 1884.djvu/374

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cusation de tyrannie qui seule pouvait excuser, et, dans une certaine mesure, rendre légitime la révolte de ses sujets. Au point de vue des résultats, cette insurrection, condamnée d’avance à l’échec, sembla compromettre, pour un temps, la cause de la liberté et du « self-govermnent » qu’elle voulait servir. Et cependant, si les Canadiens français obtinrent plus tard les garanties parlementaires qu’ils avaient vainement revendiquées depuis la conquête anglaise, s’ils parvinrent à asseoir leur gouvernement sur la base d’une représentation exacte de leur nombre et de leurs intérêts, s’ils sont aujourd’hui, vis-à-vis de l’Angleterre, sur un pied d’égalité complète avec leurs co-sujets de race anglo-saxonne, et si enfin le lien même de la colonie avec la métropole s’est aujourd’hui relâché au point que le Canada est à proprement parler une « puissance » indépendante, et que les Canadiens français peuvent, sans cesser d’être « loyaux », acclamer la France dans leurs assemblées et même arborer son drapeau dans leurs jours de fête, — qui dira que la cause n’en remonte pas à cette insurrection de 1837-1838, et que l’honneur n’en revient pas à ces exaltés, à ces fous, qui, sans trop calculer les conséquences de leur révolte, sentirent bouillonner leur sang quand la coupe d’oppression et d’opprobre fut pleine jusqu’au bord, s’armèrent des premières armes qu’ils rencontrèrent et versèrent leur sang généreux, sur les champs de bataille ou sur l’échafaud, pour cette cause sacrée de l’indépendance de leur terre natale ?