Page:Revon - Anthologie de la littérature japonaise, 1923.djvu/196

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dant, depuis qu’elle était malade, n’en avait que plus de pitié pour elle ; et sans prêter l’oreille aux calomnies des autres, il l’aimait d’un amour qu’on eût pu donner en exemple à la postérité.

Même les kanndatchimé et les ouébito[1] n’osaient la regarder en face ; et elle était respectée de tous les autres En Chine, pour une cause analogue, il y avait eu des troubles terribles dans le monde ; c’est pourquoi elle devenait ; sous le ciel, un sujet d’inquiétudes pour bien des gens, qui comparaient son cas à celui de Yo Kihi[2]. Mais quoiqu’elle fût ainsi mal accueillie de son entourage, s’appuyant sur la rare faveur du souverain, elle se montrait toujours aimable avec les autres femmes.

(Chap. I, Kiri-tsoubo.)

MORT DE KIRI-TSQUBO[3]

Dans l’été de cette année-là[4], Madame la miyaçoudokoro[5] fut atteinte d’une maladie qui semblait légère. Elle voulut se retirer de la cour. L’empereur refusait, disant qu’elle était un peu faible, à son ordinaire, mais qu’elle devait rester encore, essayer des médicaments. Cependant, quelques jours après, son état devint plus grave. Sa mère demanda, avec des larmes, et obtint enfin

  1. Les premiers étaient les courtisans du 3e rang (le plus élevé auquel on pût arriver dans la pratique) ; les seconds, ceux des 4e et 5e rangs. Ils se distinguaient des courtisans de rangs inférieurs en ce qu’ils avaient le droit de monter au Palais.
  2. Célèbre favorite d’un empereur chinois du viiie siècle qui, après vingt années de sage gouvernement, devint sur son déclin un houveau Salomon, se fit amener de force cette jeune princesse, puis oublia pour elle tous les soins de l’administration, opprima le peuple, dispensa honneurs et châtiments contre toute justice, et finalement, après une rébellion formidable, se vit contraint de la faire décapiter pour conserver son empire.
  3. Ce passage est connu des lettrés japonais sous le titre de Kiri-tsoubo kot no Sokkyo, « Le trépas (sokkyo n’étant employé que dans un sens noble) de la concubine impériale Kiri-tsoubo ».
  4. Celle où, le petit prince Ghennji ayant atteint sa troisième année, on avait célébré en grande pompe son hakamaghi, la « prise de pantalons » qui marquait le passage de la première à la seconde enfance. Cette cérémonie avait lieu, d’ordinaire, quand l’enfant avait cinq ans ; à la cour, elle était avancée.
  5. Titre assez honorifique pour qu’on puisse l’appliquer, de nos jours, à l’épouse d’un prince du sang.