Page:Revue de linguistique et de philologie comparée, tome 41.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 90 —

« Neuf », bederatzi, exprime peut-être une idée inverse, mais on y trouve « un » bed et non point « dix » : que signifie la terminaison eratzi ? Il faut remarquer que « huit » zortzi offre une formation analogue et peut être facilement ramené à zoreratzi ; « neuf » pourrait d’ailleurs être considéré comme réduit de batzortzi. Par conséquent, ou « neuf » est « un et huit », ou « neuf » et « huit » sont tous les deux composés de la même façon et pourraient signifier « un de moins (que dix), deux de moins » : des exemples analogues ne manquent pas : undeviginti, duodeviginti ; unnîs, untîs, unsàu, etc., de l’hindoustani ; tonpadu, tonnûr’u « dix incomplet, cent incomplet » (neuf, quatre-vingt-dix) du tamoul ; emmidi « huit » dérivé de padi « dix » du télinga, etc. Dans erazi, il y a peut-être le préfixe dérivatif era qui joue un si grand rôle dans le verbe basque où il forme la voix causative : yoan, eroan ; eman, eraman ; egin, eragin ; egotzi, eragotzi ; et même yarri, ezarri. Quant à atzi, les radicaux atz « doigt, trace », atze « suite », atzi « prendre, cueillir », atzo « hier », etzi « après-demain », présentent une idée commune de « faiblesse, imperfection, incomplet ». Donc, bederatzi et zortzi peuvent avoir le sens primitif de « un manquant, deux manquant » ou analogue.

Pour « neuf », pas d’objection sérieuse. Mais pour « huit » ? Il faudrait que zor ait la signification de « deux ». Les radicaux en zor ont en général le sens de « diminution, déchirement, faiblesse (physique ou morale) ». M. Stempf, s’appuyant sur le double sens de erdi « moitié » et « accoucher », a rapproché sor