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Page:Ronsard - Les Amours, 1553.djvu/70

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Par un apât, suit la fin de sa vie,
Ainsi je vois, ou la mort me convie,
D’un beau tetin doucement apâté.

Qui eut pensé, que le cruel destin
Eut enfermé sous un si beau tetin
Un si grand feu, pour m'en faire la proïe ?

Avisés donc, que seroit le coucher
Entre ses bras, puis qu’un simple toucher
De mile mors, innocent, me foudroïe.

MURET.

Pleut il a dieu.) Il se repent d’avoir touché le tetin de sa dame, parce que delà s’est échaufé dans son cœur un si grand desir de plus grand bien, que pour ne le pouvoir exécuter, il soufre un torment égal a mile mors.


Contre mon gré l'atrait de tes beaus yeus
Donte mon cœur, mais quand je te veus dire
Quell'est ma mort, tu ne t'en fais que rire,
Et de mon mal tu as le cœur joïeus.

Puis qu'en t'aimant je ne puis avoir mieus,
Soufre du moins que pour toi je soupire,
Assés & trop, ton bel œil me martire
Sans te moquer de mon mal soucieus.

Moquer mon mal, rire de ma douleur,
Par un dedain redoubler mon malheur,
Haïr qui t'aime, & vivre de ses pleintes,

Rompre ta foi, manquer de ton devoir,
Cela, cruelle, & n'est-ce pas avoir
Tes mains de sang & d'homicide teintes ?