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pendant ses nichées ; quand il ne trouve plus de chenilles, il vole après les papillons pour les prendre & les emporter dans son nid. La guerre trop meurtrière qu’on déclare à ces sortes d’oiseaux qu’on tue ou qu’on prend dans le nid, est peut-être la cause que les chenilles sont si multipliées dans certaines années : il est évident, qu’en détruisant les espèces qui les dévorent, nous veillons à la sureté de nos ennemis, sans nous en douter.


Article III.

Des moyens qu’on peut employer pour détruire les Chenilles.


Lorsque nous observons les arbres de nos jardins, de nos vergers, dépouillés de leurs feuilles par les chenilles, qui les ont réduit dans un état languissant, qui nous fait craindre de les perdre ; lorsque nous voyons les campagnes dévastées par leurs dégâts, nous voudrions que le nombre des ennemis de ces insectes fût encore plus grand, afin qu’ils succombassent entièrement à leurs attaques. En conjurant leur perte, nous souhaitons de pouvoir anéantir leur espèce ; mais comme il y a toujours une compensation dans l’ordre de la nature, on ne peut détruire une espèce sans qu’une autre, souvent plus désastreuse, ne se multiplie : détruisez les renards, les mulots abymeront vos terres. Il faut avouer qu’il y a des années où les chenilles font de si grands ravages, qu’elles nous privent des plus beaux fruits, de l’agrément de voir une belle verdure, de nous mettre sous son ombre dans une saison où on la recherche avec plaisir, & où on en jouit avec délices : tous ces traits sont bien propres à exciter notre courroux & notre vengeance contr’elles. Pour venir à bout de nos desseins destructeurs, il faut attaquer ces sortes d’ennemis dans leur berceau : si nous attendons que l’âge les ait affranchis des entraves de leur enfance, tous nos efforts seront inutiles ; malgré nous, ils feront le mal dont ils sont capables.

Dans le détail des espèces de chenilles les plus communes & les plus à craindre, nous avons indiqué la manière dont les papillons femelles font leur ponte : cette connoissance est nécessaire pour pouvoir distinguer les nids des jeunes chenilles. Nous avons vu qu’il y en avoit qui formoient des nids en filant une espèce de coque, dans laquelle elles se retirent pendant la nuit, lorsqu’il fait froid ou qu’il pleut : voilà donc le berceau où naissent, où vivent les ennemis que nous sommes si intéressés à détruire. Pour y réussir d’une manière efficace, il faut couper les extrémités des branches, sur lesquelles ces nids sont placés, & les jetter au feu tout de suite ; parce que, si on les laissoit à terre, les jeunes chenilles qui ont été secouées, sortiroient & se répandroient par-tout. Ces nids ne sont pas toujours à la portée de notre main, quelques-uns sont placés à l’extrémité des branches des arbres très-élevés : dans ces circonstances, on se pourvoit d’une longue perche, au bout de laquelle on attache des ciseaux, nommés échenilloirs : (voyez le gravure des instrumens d’agriculture & du jardinage, au mot outils.) Le temps le plus propre pour écheniller, est lorsqu’il fait froid, parce