Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/424

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

serviroit chaque année à diminuer la pente du champ. De pareilles terres font toujours d’excellens engrais.

Si la possession se trouve dans une plaine, il est également nécessaire de l’entourer de fossés & de haies : 1.o ces fossés servent à recevoir & à conduire toutes les eaux du champ dans la partie la plus basse, & par conséquent à empêcher que les plantes ne soient submergées & ne pourrissent par la stagnation des eaux, surtout pendant les hivers pluvieux. 2.o Dans les pays naturellement secs, ces fossés sont autant de réservoirs qui conservent pendant longtemps, une masse d’humidité dont la fraîcheur se communique parallèlement à une très-grande distance. 3.o Dans les pays plats, comme sur les coteaux, ils défendent l’entrée des champs aux bestiaux & animaux en tout genre. 4.o Rien n’est aussi utile que les clôtures en haies parsemées d’arbres, pour mettre les moissons à l’abri des vents. Le pays est sec ou humide, en raison du climat, ou par lui-même. Si c’est un bas fonds, par exemple, comme en Hollande, la terre, enlevée du fossé, & jetée sur ses bords, retiendra l’eau, formera un canal, l’empêchera de se répandre sur le champ, & des moulins nommés pouldres, sans cesse mus par les vents, porteront les eaux surabondantes dans des canaux supérieurs, & de canaux en canaux dans la mer : mais comme tous les pays ne ressemblent pas à la Hollande, & qu’on n’est pas sans cesse forcé de lutter contre l’eau, dans la crainte de la submersion, je cite cet exemple seulement pour prouver ce que la nécessité sans cesse présente a fait imaginer à ce peuple industrieux. Je ne crois pas qu’il existe en France aucun bas fonds semblable qui soit cultivé : s’il existe, il est métamorphosé en étang, & son produit égale celui qu’on en retireroit par la culture. Laissons donc les extrêmes pour nous attacher aux circonstances plus communes. Un fonds simplement aquatique, est desséché par les fossés, & ce fonds est nécessairement destiné aux prairies naturelles qui élèvent graduellement le sol. S’il est simplement humide, la clôture est également nécessaire, parce que l’herbe qui y pousse est aigre, & fournit une très-médiocre nourriture au bétail ; mais si ce fonds est cultivé, & par exemple semé en blé, il n’est pas rare de voir les blés versés, & souvent périr sur terre avant leur maturité. Les sols bas, en général, sont toujours très-productifs, parce qu’ils sont les réceptacles de l’humus, ou terre soluble (voyez ce mot) des champs supérieurs : dès-lors les épis sont garnis de beaucoup de grains très-nourris, & par conséquent pesans ; dès-lors la tige fatiguée par le moindre tourbillon de vent, plie sous le poids, s’incline, se couche sur sa voisine qui ne peut la soutenir, & de proche en proche, toutes les tiges sont couchées sur terre. Une haie parsemée d’arbres, se seroit opposée au vent, & l’épi seroit resté sur sa tige droite.

Si le champ est naturellement sec, les haies dont on parle produiront un effet admirable. L’expérience a démontré qu’un terrein boisé est beaucoup plus couvert de rosée, qu’un terrein qui ne l’est pas ; que les arbres attirent l’humidité de l’atmosphère, & qu’ils lui en rendent une grande quantité par leur