Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 3.djvu/528

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IV. Des couches composées. Toutes les substances susceptibles de fermentation, agissent d’une manière plus prompte ou plus lente. On est parti de ce principe, pour prolonger la durée de la chaleur des couches. On sait que le tan est long à fermenter ; que sa chaleur dure plus que celle des autres fumiers ; que le fumier de vache, de bœuf fermente moins vîte que celui de cheval ; enfin, que les balles du blé, de l’orge, de l’avoine, &c. (voy. le mot Balle) lorsqu’elles sont un peu humectées, & en masse, acquièrent une forte chaleur.

On garnit le fond de la couche avec un pied de fumier de cheval, par-dessus six pouces de fumier de vache, six pouces de fumier de mouton, mêlé avec la balle des graminées. Le tout sera exactement affaissé, battu & piétiné, comme il a été dit. On recommence ainsi, jusqu’à ce que la couche soit parvenue à une hauteur convenable ; mais il faut toujours finir par un lit de fumier de cheval. Après qu’elle est faite, on l’arrose, afin d’établir la fermentation : huit jours après, on la piétinera, on l’affaissera de nouveau, & on la couvrira de terreau.

V. Du diamètre des couches. Tous les fluides tendent à se mettre en équilibre ; c’est pourquoi, lorsque la chaleur de l’atmosphère est nulle, c’est-à-dire, que le froid est de plusieurs degrés au-dessous du terme de la glace du thermomètre de M. de Réaumur, l’air froid attire, en raison de son intensité, la chaleur de la couche. Si, au contraire, l’air étoit aussi chaud que celui qu’on respire au Sénégal, il communiqueroit à la couche son intensité de chaleur, si elle en avoit moins que lui. D’après ce principe, il faut donc proportionner le diamètre des couches à la saison ; ainsi les couches que l’on fera pendant les mois rigoureux de l’hiver, seront plus hautes que larges. Trois pieds formeront leur hauteur, & deux pieds à deux pieds & demi, leur largeur : lorsque la saison s’adoucit, la hauteur diminue d’un pied, & la largeur s’étend jusqu’à quatre ; enfin, en avril, (climat de Paris) une couche d’un pied suffit.

VI. Des réchauds, c’est-à-dire, des substances qui réchauffent une seconde, une troisième fois, &c. Ce sont les mêmes que celles employées dans la couche, N°. 3. On élève ces fumiers nouveaux tout autour des couches, on les arrange comme les premiers, dès qu’on s’apperçoit que la chaleur de la couche commence à trop diminuer : alors ce réchaud, presqu’aussi large que la couche, fermente & communique sa chaleur à la couche ; enfin, on les renouvelle au besoin, & on parvient, par leur moyen, à conserver les plantes malgré les rigueurs de l’hiver.

Il seroit impossible que les plantes pussent subsister pendant les froids, si elles étoient exposées au contact de l’air, tandis que leurs racines seroient environnées de chaleur ; ce contraste les tueroit infailliblement. Pour prévenir cet inconvénient, chaque plante est recouverte de sa cloche, (voyez ce mot) ainsi qu’on le voit, Planche 5, Fig. 5… La cloche est abaissée pendant les gelées, & recouverte par-dessus avec de la litière longue & des paillassons, au besoin. Si le froid rigoureux dure pendant long-temps, & que son âpreté ne permette pas de soulever les cloches