Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1783, tome 4.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se développera. Écussonner, c’est lever avec dextérité ce morceau d’écorce, & avec la même dextérité, le placer dans l’incision faite à l’écorce d’un autre arbre. Au mot Greffe, cet article sera traité très-en détail.


EFFANER ou EFFEUILLER, mots synonymes. C’est, en général, supprimer les feuilles capables de s’opposer à la maturité des fruits ; cette opération est différente de celle de l’ébourgeonnement. (Voy. ce mot) Les cultivateurs qui nourrissent beaucoup de chèvres, de vaches, dans les cantons où les pâturages ne sont pas abondans, trouvent une ressource précieuse, en effeuillant la vigne, &c. Consultez ce qui a été dit au mot Bétail relativement aux provisions d’hiver. Un effeuilleur trop avide, fait périr beaucoup de raisins, ou bien, suivant la circonstance, il s’oppose à leur entière maturité ; effanez donc modérément, sur-tout près du fruit, & dès que la récolte sera faite, songez alors à celle des feuilles. Dans les provinces où le raisin mûrit difficilement, il se fane & se flétrit sur le cep, si on prive le sarment de toutes les feuilles ; dans les méridionales, au contraire, le raisin parvenu presque au point de sa maturité complète, gagne à être rigoureusement effeuillé. Cette opération modère l’affluence de la sève, le peu qui pénètre du sarment au raisin est mieux élaboré, moins aqueux ; la partie sucrée le développe davantage dans le fruit, l’acide est mieux enveloppé ou masqué par la partie sucrée ; enfin, la transpiration poussant au-dehors la surabondance de l’eau contenue dans chaque grain, il ne contient plus qu’un suc bien épuré, bien sucré & aromatisé suivant l’espèce de raisin. Lorsqu’il est dans cet état, s’il survient une pluie, il faut se hâter de vendanger, afin de prévenir une ascension nouvelle & surabondante de la sève qui rempliroit les grains, & délayerait les principes constitutifs du vin ; cependant, si l’on prévoit que la pluie ne soit pas de durée, on ne risque pas d’attendre & de laisser encore le raisin sur le cep, la chaleur dissipera bientôt cette aquosité inutile. Il est aisé de voir, d’après cet exposé, à quel point la même opération devient nuisible ou avantageuse, suivant les pays, suivant les circonstances, & combien les écrivains ont tort de généraliser les préceptes qu’ils donnent.

M. Roger de Schabol dit avec raison, « que l’effeuillage est une des opérations les plus délicates & les plus scabreuses du jardinage. On ne doit jamais arracher les feuilles, si ce n’est aux branches ou rameaux inutiles, mais les couper à moitié ou vers la queue à ceux des bourgeons dont on attend du fruit, ou sur lesquels on prévoit qu’on taillera l’année suivante. On coupe ces feuilles avec l’ongle ou avec des ciseaux. Un bouton à fruit effeuillé, avec feuilles arrachées, ou avorté, c’est la même chose. La feuille est la mère nourrice du bouton ; si vous lui ôtez cette nourrice, il faut qu’il meure de disette ou de faim. Si une autre feuille naît à la place de celle que vous avez ôtée, cette feuille est formée de la substance même du bouton, & telle est la raison pour laquelle il avorte. »

Les préceptes donnés par M. de Schabol, ne contredisent point ce que j’ai dit plus haut : il faut considérer l’époque de l’effeuillage &