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de la tonte, que l’on ne doit faire qu’après avoir laissé sécher la laine, afin que la toison ne soit pas sujette à se gâter par l’humidité. Il faut donc tâcher de ne faire le dernier lavage que par un beau temps.

Les gens de la campagne ont beaucoup de présages du beau temps ou de la pluie ; mais la plupart de ces présages sont faux ou trop incertains ; ils ne connoissent presque pas le meilleur qui est le baromètre. Un berger bien instruit devroit le connoître ; on voit dans un tuyau de verre, du vif argent qui monte ou qui descend en différens temps ; à côté du tuyau, la hauteur est marquée par pouces & par lignes. (Voyez baromètre & la planche fig. 1, tom. 2, pag. 158.) Lorsqu’on regarde le baromètre, on remarque à quel point de hauteur & à quelle ligne est le vif-argent : on revient quelque temps après, & on voit si le vif-argent a monté ou descendu ; s’il a monté, c’est signe de beau temps ; s’il a descendu, c’est signe de pluie ou de vent.


§. IV. Comment faut-il tondre les moutons ? Du traitement qu’il faut leur faire, lorsqu’ils sont tondus. Ce qu’il y a à craindre pour les animaux après la tonte ; moyens d’éviter tous les dangers.

On est dans l’usage, quand on veut tondre les moutons, de leur lier les quatre jambes ensemble pour les empêcher de se débattre, mais c’est une mauvaise pratique ; lorsqu’on les gêne ainsi, le ventre, & par conséquent la vessie, sont pressés, de façon que l’urine & la fiente sortent & salissent la toison, il vaut mieux coucher le mouton sur une table percée de plusieurs trous près du bord ; on passe un cordon en plusieurs endroits par les ouvertures, pour retenir sur la table les jambes de devant dans un endroit, & les jambes de derrière dans un autre. (Voyez la planche XI de l’ouvrage ci-dessus cité.) Lorsque c’est un bélier cornu, on attache aussi l’une des cornes sur la table ; par ce moyen, la bête est moins gênée, & les tondeurs travaillent à leur aise ; ils peuvent être assis. Cette commodité est nécessaire pour un ouvrage qui demande de l’attention & de l’adresse, car il faut couper la laine avec les forcèps, très-près de la peau, sans la blesser. Lorsque le mouton est tondu sur l’un des côtés du corps, on le délie, on le retourne, & on l’attache de l’autre côté.

Lorsque les moutons sont tondus, si l’on apperçoit quelque signe de gale, (voyez ce mot) il faut les frotter avec un onguent de graisse ou de suif & d’essence de térébenthine. Si la peau a été entamée par les forcèps, le même onguent est bon pour ces petites plaies. Cet onguent se fait de la manière suivante :

Faites fondre une livre de suif en été, ou de graisse en hiver, retirez-la du feu, & mêlez avec le suif ou la graisse un quarteron d’huile de térébenthine ou plus, s’il est nécessaire pour la gale.

La grande chaleur du soleil & les pluies froides sont à craindre pour les moutons pendant dix ou douze jours après la tonte. Le grand soleil racornit leur peau sur le dos, & la dispose à la gale & à d’autres maladies, tandis que les pluies froides, morfondent les moutons & les transissent au point de les faire mourir, si on ne les réchauffe promptement.