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pour assurer la hauteur du tronc.

Le noyer, livré à lui-même, dispose ses branches & sa tête en forme ronde ; c’est donc sa forme naturelle & celle qu’on doit lui conserver : le grand point est de lui laisser toujours un tronc fort élevé, à cause de sa valeur, quand il est sain, & afin que les branches s’élancent en l’air. Les branches doivent être disposées de manière qu’elles ne s’entrelacent point les unes avec les autres ; que l’arbre soit dégagé dans le centre, afin que l’on puisse aisément aboutir aux différentes parties, pour faire tomber le fruit lors de la récolte.

La feuillaison des branches s’exécute toujours sur le bois nouveau de l’année précédente, c’est une des raisons principales, pour qu’elles s’alongent sans cesse, & que le plus grand poids soit à l’extrémité. Ainsi, en supposant que, par la taille, on ait donné à une mère branche, par exemple, la direction de l’angle de quarante-cinq degrés, on ne sera pas étonné si, peu à peu, elle prend celle de cinquante ou de soixante, sur-tout si on ajoute au poids de la branche & des feuilles celui du fruit : il résulte donc de la croissance, du prolongement & de l’inclinaison annuelle des mères branches & des rameaux secondaires, que les inférieurs toucheront presqu’à terre, que les branches supérieures s’inclineront sur les inférieures ; que celles du sommet, moins longues, conserveront la perpendicularité jusqu’à ce que, pressées par de nouvelles, elles suivent la même loi des premières : enfin, de pression en pression s’établit la forme ronde de la tête de l’arbre. On cherchera en vain à la contrarier, en taillant l’arbre en buisson, (voyez ce mot) peu à peu il reprendra ses droits. Je ne veux pas dire qu’il ne faille tailler cet arbre ; au contraire, je demande la suppression des branches les plus basses, lorsque les rameaux sont près de terre : il en résulte deux avantages ; l’arbre a plus d’air dans l’intérieur de ses branches, & les branches du sommet s’élèvent davantage ; enfin, par la suppression des branches inférieures on a une plus grande partie de champ à cultiver ; d’ailleurs, il est rare que les fruits placés sur ces rameaux pendans & rapprochés du sol, soient pour le propriétaire : c’est sur-tout après l’amputation de ces grosses branches, que l’on doit faire usage de l’onguent de saint Fiacre, recouvert par une planche, parce que la cicatrice se forme difficilement : le bon cultivateur ne se hâte pas de les séparer du tronc, il élague les rameaux extérieurs, à mesure qu’ils s’inclinent trop, & même les branches secondaires qui partent des premières ; il évite, par ce moyen, la surcharge du poids, à l’extrémité du lévier, & prévient l’inclinaison des mères branches, & de ses rameaux. On doit même observer que l’amputation des mères branches, sur les vieux noyers, leur est très-préjudiciable, & que peu-à-peu l’arbre périt.

C’est sur-tout pendant les vingt premières années après la plantation, qu’on doit s’occuper essentiellement de la formation de la tête de l’arbre ; jusqu’à cette époque, son produit est de peu de conséquence, il vaut mieux le sacrifier à l’accroissement de l’arbre. Si on diffère sa propre jouissance, c’est pour mieux jouir dans la suite. Il est même essentiel, jusqu’à un cer-