Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/275

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commence dans l’endroit où le coup de gaule a meurtri l’écorce. Il est bien aisé de distinguer cette branche de celle dont la dessiccatiOn tient à la piqûre d’un insecte ; un seul coup d’œil suffit. Par la seule opération de la gaule on détruit donc & les boutons par les feuilles & les rameaux ; & du même coup les ressources pour la récolte prochaine & pour celle de l’année d’après, sont anéanties. On se plaint que la rigueur des hivers nuit beaucoup aux rameaux, & qu’elle en fait périr un grand nombre, c’est dans l’ordre naturel : une branche, un rameau chargés de meurtrissures & de plaies, dont les cicatrices ne sont pas encore formées, sont bien plus vivement attaqués par le froid que de semblables rameaux bien sains, &c.

Les cultivateurs accoutumés à gauler, regarderont ces observations comme minutieuses. Nous gaulons & nous avons des récoltes, voilà leur réponse. Mais les récoltes ne prouvent que l’excessive fécondité de l’olivier, ainsi que je l’ai déjà remarqué si souvent ; les marques du gaulage ne sont pas moins visibles sur l’arbre qui semble déshonoré après la cueillette du fruit ? Les partisans du gaulage devraient donc ajouter que leurs arbres sont plus maltraités par le froid, & qu’une plus grande masse de rameaux de feuilles sont détruits : ce fait est palpable.

Il n’y a qu’une seule bonne manière de cueillir les olives, c’est à la main comme on cueille les cerises, les prunes, &c. : c’est la méthode suivie dans les environs d’Aix, où les oliviers sont tenus fort bas ; mais est-elle admissible dans les cantons où les oliviers sont plus élevés ? Il s’agit de s’entendre. Si on parle des oliviers d’une très-grande hauteur, comme ceux de la rivière de Gènes, &c., elle est difficile quoique très-possible ; il suffit d’avoir des échelles vulgairement nommées échalassons, qui seront décrites au mot outils d’agriculture, & dont on se sert dans une très-grande partie du royaume pour la cueillette des feuilles de mûrier, dans les provinces où l’on n’a pas la sotte manie d’écraser la tête de cet arbre. (Voyez le mot Murier). Il suffit dans ce cas, que l’échalasson soit léger & long, en un mot, tel qu’on l’applique communément contre les plus hauts cerisiers.

Si l’olivier est de hauteur moyenne, les mêmes échalassons, ou encore mieux de légères échelles d’engin, (voyez le mot Outil) que l’on promène tout autour de l’arbre, donnent la plus grande facilité pour la cueillette, & quelques personnes placées sur les branches de l’arbre ramassent le fruit des rameaux du centre, en courbant doucement le sommet des jeunes branches. Je réponds & j’affirme, d’après ma propre expérience, que ce travail n’est ni plus long, ni plus coûteux que le gaulage, si toutes les circonstances sont égales ; & j’ajoute, qu’il est moins dispendieux pour moi, parce que je n’emploie que des femmes, dont la journée est à huit sols, tandis que celle des hommes est à vingt sols. Un homme fait-il dans ce genre deux fois & demie plus de travail qu’une femme ? Les toiles une fois tendues sous l’arbre, la femme n’a qu’à cueillir & à laisser tomber, & après la cueillette d’un arbre, plier les toiles & les débarrasser si elles sont trop chargées.