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en pâte, & l’avoir entassée, on couvre le tas pour le garantir de la pluie, & l’on place tout autour des soufflets que l’on met en action, afin de dissiper l’humidité : on forme ensuite avec cette pâte des gâteaux, ronds que l’on porte dans un lieu découvert, exposés au vent & au soleil pour qu’ils se dessèchent de plus en plus, & que l’humidité ne les fasse pas pourrir. L’action des soufflets devient utile dans les pays naturellement peu chauds, dans les saisons froides, humides & pluvieuses ; car il est bien démontré qu’un courant d’air excite plus l’évaporation que la chaleur.

Lorsque les gâteaux entassés s’échauffent par la fermentation qui commence à les travailler, alors l’odeur devient insupportable en raison de la chaleur de la saison & de celle de la masse fermentante. On augmente de plus en plus la chaleur du pastel en l’arrosant d’eau, jusqu’à ce qu’il soit réduit en poudre grossière qui est en usage dans la teinture, & que l’on appelle pastel préparé.

La méthode françoise n’est pas la même, & varie suivant les provinces. Après que le pastel a resté en pile, il s’y forme en dehors une croûte qui devient noirâtre : quand elle s’entrouvre, on l’unit de nouveau avec beaucoup de foin ; autrement le pastel s’éventeroit, & il se formeroit dans les crevasses de petits vers qui le gâteroient. Après quinze jours on ouvre le monceau de pastel, on le broye entre les mains, & on mêle ensemble la croûte & le dedans ; il faut même écraser quelquefois la croûte avec une masse, pour parvenir à la broyer. Il ne s’agit plus que de réduire cette pâte en coques ou pelotes rondes qui doivent peser, suivant l’ordonnance, cinq quarterons, poids de table, ce qui revient à peu près à une livre poids de marc. Après avoir bien serré ces pelotes en les formant, on les donne ensuite à une autre personne qui, en les appuyant dans une écuelle de bois, les alonge par les deux bouts opposés. Du mot Coque est venue la dénomination de pays de Coquaigne, pour dire un pays riche, parce que les cultivateurs s’enrichissoient autrefois par le commerce de cette préparation.

Le pastel donne une belle couleur bleue, & rend les autres couleurs plus pénétrantes ; il leur sert de pied. Les teinturiers l’unissent souvent avec l’indigo ou anil ; consultez ce dernier mot, afin de voir que le pastel & l’indigo sont deux plantes très différentes.

Il y a une si grande ressemblance entre la partie colorante de ces deux plantes, qu’il paroît que l’on devroit traiter le pastel comme l’indigo, & on obtiendroit peut-être une préparation qui égaleroit celle de l’Amérique. J’invite les cultivateurs de pastel à lire attentivement l’article anil, & à suivre les procédés qui y sont décrits. La partie fibreuse de la plante peut fort bien altérer la partie colorante de la fécule. C’est une expérience à tenter, ainsi que celle de réduire cette fécule en forme de pierre, tel qu’on vend le bon indigo dans le commerce. Je prie ceux qui feront ces expériences, d’avoir la bonté de m’en communiquer les résultats.


PASTENADE. (Voyez Panais)


PASTEUR. (Voyez Berger)