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des rivières, est due à la légèreté spécifique du sable, comparée à la force du courant, & tous les dépôts locaux par l’opposition de deux courans ; mais si dans une même masse d’eau deux courans agissent en sens contraire, c’est-à-dire, si l’un vient du midi & l’autre court au nord, comme on le voit souvent en mer, alors le dépôt de sable s’établit entre ces deux courans, & bientôt il s’y forme des isles. C’est par la même raison que les deux fleuves déja cités sont chargés d’isles sablonneuses, quoique leurs courans ne soient pas en sens contraire. Toutes les fois que dans la masse d’eau de ces fleuves il y a un seul courant, ce qui arrive toujours dans les endroits où les eaux sont encaissées, il ne s’y forme jamais d’isles ; mais si ces fleuves roulent dans la plaine, s’ils s’y étendent avec liberté, alors plusieurs courans s’établissent, & dans l’entre-deux les sables s’y accumulent. C’est toujours au point de la jonction de ces courans que commencent les dépôts ; de là l’origine des isles placées à l’embouchure des grandes rivières qui se jettent dans la mer.

On est tout étonné de trouver aujourd’hui dans les montagnes des dépôts de sables assez nets, quoique leur base soit de beaucoup au-dessus du lit actuel des rivières. Ces dépôts ont été formés dans le temps, de la même manière que nous les voyons s’accumuler sous nos yeux dans le cours des rivières rapides, & on les trouve assez communément sur la droite ou sur la gauche de la montagne qui domine la plaine, suivant la direction qu’a dû avoir le courant auquel ils doivent leur existence.

Toute terre actuellement existante n’est autre chose que la décomposition des pierres quelconques, à laquelle il faut réunir celle des animaux & des végétaux. Toute espèce de terre renferme encore du plus au moins des portions de sable, & ce sable ne s’est pas encore réduit en terre, parce qu’il est trop dur, & qu’il n’a pas encore eu le temps de se décomposer, ou par les acides contenus dans le sol, ou par ceux de l’atmosphère, ou enfin par les effets des météores. Ce qui les a garanti ou ce qui a retardé leur décomposition, est leur nature vitrifiable, sur laquelle les acides ont peu ou point d’action, tandis qu’ils agissent avec force sur les substances calcaires, les dissolvent & les réduisent en terreau ou humus.

il est facile de juger de la nature du sol d’un champ ; il suffit, après une grande pluie, de suivre les dépôts que les eaux ont laissés après leur écoulement. Elles ont entraîné & dissout toute la terre végétale, & déposé sur leurs bords la terre sablonneuse ou vitrifiable. Or, plus on trouve de sable, & moins le sol du champ est fertile. Je conviens que cette assertion est trop générale ; cependant elle est vraie quant au fonds, parce que la fertilité du champ tient aux combinaisons des autres terres qui en forment le sol. Dans ce cas le sable n’y est que comme terre matrice, nullement productive, & uniquement destinée à recevoir les racines des plantes. Il n’existe qu’une seule terre vraiment nourricière des plantes, c’est l’humus ou terre végétale, soluble dans l’eau, & uniquement formée par les décompositions des plantes & des animaux. Consultez le mot Terre. Actuellement,