Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/579

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moyen desquels s’exécutent les sécrétions des humeurs, & la circulation du sang ? la question paroît, quant au fond, encore indécise, parce qu’aucune expérience tranchante n’a démontré une similitude exacte. Cependant il règne une si grande analogie entre le mode d’existence de l’homme, de l’animal & du végétal, qu’il est comme impossible de ne pas admettre l’existence de ces vaisseaux. Dans l’animal, la circulation est démontrée, & l’illustre M. Sauvage l’a calculée dans son hémostatique. Il est reconnu au contraire que la sève, dans le végétal, n’y circule pas, comme le sang dans l’animal, mais qu’elle est charriée, pendant le jour, des racines au sommet de l’arbre, par un mouvement ascendant, & du sommet aux racines, pendant la nuit, par un mouvement descendant : enfin, que pendant cette marche continuelle, la sève (consultez ce mot) ainsi se perfectionne, s’épure & se raffine par le secours d’abondantes sécrétions. On est donc forcé de se contenter à conclure par analogie, & quoique ce genre de démonstration ne soit pas susceptible de la rigueur géométrique, il ne sert pas moins à expliquer les phénomènes de la nature, en attendant qu’un génie observateur vienne en découvrir le secret. M. Duhamel, que j’ai toujours cité par reconnoissance, a réuni dans son ouvrage intitulé Physique des arbres, les différens systêmes sur cette question ; je vais faire connoître son travail. Ce qu’il a dit vaut mieux que ce que je pourrois dire.

Quand on examine, dit M. Duhamel, les couches corticales, on apperçoit à la vue simple, ou encore mieux, à l’aide d’une loupe, que les couches dans les arbres sont, en grande partie, formées par des filamens qui s’étendent suivant la longueur du tronc, & encore par une grande quantité du tissu cellulaire. On peut faire les mêmes observations sur le corps ligneux, quoique sa dureté le rende moins favorable à cette direction. L’existence de ces substances est donc trop sensible, pour qu’elle ait jamais pu être niée. Elles ont été observées par tous les physiciens qui se sont occupés de l’anatomie des végétaux. Cependant quelques auteurs ont comparé ces fibres à des filamens qui laissent entre eux des pores. D’autres auteurs, mais un plus grand nombre ont pensé que ces fibres formoient des vaisseaux creux.

On convient que l’écorce & même le bois contiennent des liqueurs ; & comment pourroit-on n’en pas convenir, puisqu’on voit que l’un & l’autre perdent une partie considérable de leur poids, à mesure qu’ils se dessèchent ? On ne peut pas s’empêcher d’avouer que ces fibres servent à porter la nourriture, ou la sève, aux différentes parties de l’arbre ; mais quelques physiciens ont pensé que le mouvement de la sève n’exigeoit point qu’elle fût contenue dans des vaisseaux particuliers. Il est constant, disent-ils, qu’on apperçoit aisément sur la coupe transversale d’un morceau de chêne, d’orme, &c. quantité de troncs qui paroissent être les extrémités d’autant de tuyaux ; mais ces tuyaux sont vides, & ils ne rendent aucune liqueur par leur section ; donc ces pores, ou, si l’on veut, ces vaisseaux ne sont point destinés à contenir des liqueurs, mais