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rudiment de tige un peu ligneuse. On les coupe à rase du tronc, ou les laisse quelques jours à l’ombre pour que la plaie de l’amputation se ressuie et se cicatrise, ensuite on les plante à leur destination lorsque le sol est plus sec qu’humide. La voie des graines peut être employée avec succès, quand on veut obtenir une nombreuse multiplication. On les sème au printemps, dans le midi de l’Europe, sur des planches de terre meuble et sablonneuse. Elles lèvent en six semaines ou deux mois, et le jeune plant qu’elles produisent en quantité est propre à être transplanté au bout de la deuxième ou troisième année révolue. Ce moyen est plus long que celui des œilletons, boutures, et drageons ; mais il est plus sûr et plus abondant.

La plantation des haies d’agavé exige une préparation de terrain différente de celle qu’on emploie ordinairement pour les clôtures ordinaires. Au lieu de faire un fossé pour recevoir les plantes, on établit une berge en dos d’âne. Pour cet effet on ramasse, des deux côtés de la ligne sur laquelle on veut planter la haie, des terres dont on fait un ados de quatre pieds de large par le bas, sur deux d’élévation, lequel offre une crête large d’un pied par le sommet et dans toute la longueur de la ligne. C’est sur cette crête que se plantent, à huit ou dix pouces de distance les uns des autres, les jeunes agavés destinés à former la clôture. Ils se joignent bientôt, poussent de nombreuses racines qui s’emparent du terrain et le retiennent dans son élévation. Cette pratique a pour but de mettre les plantes à l’abri d’une humidité stagnante qui les feroit périr, de faciliter l’extraction des feuilles, et sur-tout d’économiser le terrain, en empêchant les agavés de tracer et de s’étendre trop loin. Malgré cette précaution, ces haies occupent encore près de deux toises de large, lorsqu’elles sont parvenues à toute leur grandeur. La coupe des feuilles doit se faire chaque année, lorsqu’elles ont acquis toute leur étendue, mais partiellement, et en nombre proportionné à celui des jeunes tiges qui se développent du cœur de la plante. Un gros pied en peut fournir quatre ou cinq chaque année.

Lorsque le terrain est sec de sa nature, et que le climat est chaud, la plantation peut se faire à rez-terre, dans une rigole à la manière ordinaire ; c’est le procédé employé le plus communément ; mais s’il est plus économique, il fait perdre beaucoup de terrain par le prompt élargissement que prend cette clôture.

On ne sauroit trop recommander la culture de l’agavé d’Amérique dans les pays méridionaux, pour l’emploi de terrains abandonnés comme stériles, tels que les coteaux rapides, les intervalles de rochers, et les lieux brûlés par le soleil ; terrains malheureusement trop communs dans le midi de la France, qui non seulement sont inutiles à l’agriculture, mais même lui sont très-nuisibles, puisque les sédimens pierreux qui les composent, entraînés par les orages, descendent dans les plaines fertiles, les couvrent et les rendent stériles. Des plantations d’agavés, placées dans de telles situations, arrêteroient la dégradation des montagnes, couvriroient leurs flancs nus et hideux, fourniroient une matière première à un nouveau genre d’industrie qui occuperoit beaucoup de bras désœuvrés. Cette plante seroit pour les montagnes, et les terres arides du midi de la France, ce que peut devenir le lin de la Nouvelle-Zélande, pour les plages de sable mouvant des bords de la mer, dans le même climat. (Voyez le mot Phormium.)

La seconde espèce de ce genre, qui est employée dans l’économie rurale et domestique, est l’agavé fétide, Lam., Dict. n°. 5, (agave fœtida L.) Ventenat en a formé un nouveau genre, sous