Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 1.djvu/269

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roi, le roi Jacques II sur son avènement à la couronne. Ce ministre contribua beaucoup à le faire faire duc vérifié, et à lui faire accorder la grâce très singulière de faire appeler dans ses lettres celui qui avec l’agrément du roi épouseroit sa dernière fille, belle comme le jour, et qu’il aimoit passionnément. Il avoit perdu son fils unique sans alliance au siège de Luxembourg. Il avoit marié sa fille aînée au prince d’Isenghien en obtenant un tabouret de grâce, et la seconde à Vassé, vidame du Mans, qui s’étoit remariée à Surville, cadet d’Hautefort, dont elle avoit été longtemps sans voir son père.

Le maréchal mourut assez brusquement à Versailles. Il regretta amèrement de n’avoir jamais pensé à son salut ni à sa santé ; il pouvoit ajouter à ses affaires, et mourut pourtant fort chrétiennement, et fut généralement regretté. On put remarquer qu’il fut assisté à la mort par trois antagonistes, M. de Meaux et l’abbé de Fénelon qui écrivirent bientôt après l’un contre l’autre, et le P. Caffaro, théatin, son confesseur, qui, s’étant avisé d’écrire un livre en faveur de la comédie pour la prouver innocente et permise, fut puissamment réfuté par M. de Meaux.

Le maréchal de Boufflers eut le gouvernement de Lille et de la Flandre, en se démettant de celui de Lorraine qui fut donné au maréchal de Lorges, lequel sentit vivement cette préférence de son cadet, qui valant beaucoup ne le valoit pourtant pas. M. du Maine eut l’artillerie en quittant les galères, qui furent données à M. de Vendôme en son absence. Ainsi les bâtards durent être assez contents de cette année.

Le roi donna une pension de vingt mille livres à la maréchale d’Humières, qui sans cela auroit été réduite à fort peu, et ce fut le premier exemple d’une si forte pension à une femme. Elle étoit La Châtre, avoit été fort belle et riche, car elle étoit unique, et avoit été dame du palais de la reine. C’étoit une précieuse qui importunoit quelquefois le maréchal