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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/164

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plus grandement traité par le duc de Mayenne, qui, pendant sa gestion de lieutenant général de l’État et de couronne de France, n’omit aucune de celles qui sont réservées à la personne et à l’autorité de nos rois. Il fit, en son propre nom, des déclarations et des délits qui furent enregistrés au parlement ; il fit des maréchaux de France qui en exercèrent les offices, et dont quelques-uns les conservèrent en faisant leur traité avec Henri IV ; il punit de mort et d’exil, et donna grâce de la vie ; il disposa en roi des charges, des emplois, des bénéfices de toutes les sortes, et grand nombre de ses pourvus gardèrent leurs places à la paix.

On ne peut donc pas croire qu’au temps de l’exercice de l’autorité et de la puissance royale qu’il exerça en plein dans son parti qui étoit presque toute la France et Paris surtout, personne de ce parti lui eût osé ni voulu même refuser aucun des honneurs et des distinctions, même nouvelles, qu’il eût voulu s’arroger. Les histoires et les Mémoires de ces malheureux temps rapportent une infinité d’actes de M. de Mayenne, et de lettres de toutes sortes de personnes à lui écrites. Dans pas une de ces pièces il ne se trouve d’altesse. C’est vous partout, et jusqu’à son propre secrétaire ne lui écrit jamais autrement. Il est donc vrai qu’il n’imaginoit pas de prétendre ce traitement, comme alors ni le duc de Lorraine ni aucun autre souverain qui se faisoient donner l’altesse, n’imaginoient pas le sérénissime.

Ce superlatif ne leur est venu dans la tête et dans l’usage que longtemps depuis, lorsque leurs cadets se sont fait traiter d’altesse, pour se distinguer d’eux, et cette distinction a été de courte durée. Les mêmes qui s’étoient fait donner l’altesse comme les souverains, ont pris aussi le sérénissime presque aussitôt qu’ils l’ont vu inventer, et de là est venue de nos jours l’altesse royale qui n’étoit que pour les enfants de nos rois, descendue au leur, et à cause de cela Monsieur et Madame de le quitter, et M. de Savoie, M. le grand-duc de