Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ce dernier depuis l’ouverture de la campagne, et quelques-unes même dès auparavant. Mais il ne s’agit pas encore de cette querelle.

Villeroy donc poussa sa pointe malgré les ordres d’attendre Marsin. Marlborough avoit passé la mer de bonne heure, toutes ses troupes ne l’avoient pas joint. Villeroy en avoit plus que lui. Cette raison lui donna de la confiance, il ne douta point du succès ; il n’en voulut partager l’honneur avec personne, non seulement avec Marsin et les troupes qu’il lui amenoit, mais avec l’électeur même, qui pourtant commandoit l’armée et que le maréchal avoit laissé à Bruxelles sans lui faire part de son dessein. Il s’avança donc, le 21 mai, vers l’endroit où l’année précédente Roquelaure avoit laissé percer nos lignes. Sur l’avis de la marche et de l’approche de Marlborough, il fit un mouvement pour l’attendre, puis, le 24 au matin, jour de la Pentecôte, un second pour se poster dans un terrain où feu M. de Luxembourg n’avoit jamais voulu s’exposer à combattre. Lui-même en avoit été témoin, mais son sort et celui de la France étoit qu’il l’oubliât. Il le manda par un courrier avant de prendre ce poste. M. le duc d’Orléans prédit à qui le voulut entendre qu’il y seroit battu s’il y tentoit ou y souffroit une action ; que M. de Luxembourg n’avoit jamais voulu s’y commettre ; et que sur le lieu même il lui en avoit expliqué et montré les raisons que ce prince rendit fort bien. Il ne fut que trop bon prophète.

Villeroy mit donc la maison du roi et deux brigades de cavalerie de suite entre les villages de Taviers et de Ramillies. Taviers couvroit le flanc de la maison du roi. Sa situation étoit sur un penchant près de la Méhaigne qui formoit un marais derrière, et dans ce village il mit le comte de La Mothe avec six bataillons de l’électeur et trois régiments de dragons. Il établit dans celui de Ramillies vingt-quatre pièces de canon soutenues de vingt bataillons, qui le furent ensuite d’un plus grand corps d’infanterie. Il en prit le surplus