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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/288

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quatre secrétaires d’État pour le conseil des dépêches, au chancelier et au duc de Beauvilliers qui étoient de tous, à Pelletier de Sousy et à d’Aguesseau pour le conseil des finances dont ils étoient conseillers, à Desmarets et à Armenonville, qui y entroient comme directeurs des finances, aux trois conseillers d’État du bureau de M. d’Aguesseau, et au maître des requêtes rapporteur. Tout étoit donc la cour, son pays et son règne, hors les trois derniers, desquels encore elle espéroit bien qu’aucun ne voudroit déplaire au roi, dont l’inclination étoit assez publique, surtout le rapporteur, qui, comme tous les maîtres des requêtes, avoit une fortune à faire, à obtenir une intendance, et par ce chemin à parvenir à une place de conseiller d’État, qui est le bâton de maréchal de France du métier. Monseigneur et Mgr le duc de Bourgogne, qui entroit dans tous les conseils, devoient aussi être juges.

Les écrits volèrent donc de part et d’autre. Le public en fut avide, même les pays étrangers. La maison de Rohan y perdit. Sans oser attaquer la maison de Chabot, elle voulut s’élever au-dessus de toute noblesse, en princes qui étoient d’une classe hors du niveau. Cette hauteur, destituée de toutes preuves, irrita et les véritables princes et ceux qui ne l’étoient pas, et donna un grand cours et une grande faveur aux mémoires du duc de Rohan, qui, sans attaquer aussi la maison de Rohan, mit sa chimère en pièces, et sans aucune réponse qui eut la moindre apparence ni le plus léger soutien. Il fallut avoir recours à des mensonges, à des contradictions qui étoient incontinent et cruellement relevés, et qui augmentèrent la partialité et l’indignation publique. Beaucoup de gens, paresseux jusqu’alors d’approfondir, et faciles à croire sur parole, virent clair sur cette princerie. Le plus fâcheux fut que Mgr le duc de Bourgogne, qui lisoit tout de part et d’autre, avec l’application d’un homme qui veut s’instruire pour faire justice, fut mis au fait de ce qu’il importoit tant à l’état où les Rohan s’étoient élevés de