Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/403

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des ambassadeurs, comme faisoient les princes du sang. Les cardinaux étrangers, même romains, lui écrivoient monseigneur et altesse royale ; et lorsqu’il écrivoit aux rois, excepté celui de France, il ne les traitoit point de sire, mais de monseigneur. Toutes ces raisons lui parurent bonnes pour ne faire point de façons sur le fauteuil que la reine douairière d’Espagne lui fit présenter. Le roi ne le trouva point mauvais, et en Espagne on n’osa s’en plaindre.

Ce qui en résulta au contraire fut qu’on s’y piqua de ne faire pas moins qu’à Bayonne, en sorte que don Gaspar Giron, le premier des quatre majordomes du roi, alla avec des carrosses et des équipages du roi au-devant de lui jusqu’à Burgos, c’est-à-dire de Madrid comme qui irait d’ici presqu’à Poitiers, et que sur la route, et partout, il fut reçu en infant d’Espagne. Il en eut le traitement entier, à la cour, du roi, de la reine, des infants, des grands et de tout le monde, sans que cela y ait fait, ni ici, la moindre difficulté ; mais voici ce que les excès deviennent. Ils en font naître sans fin, et il vaut mieux le dire ici tout de suite.

Lorsque la reine veuve du roi Louis Ier d’Espagne, fille de M. le duc d’Orléans, par conséquent princesse du sang, passa à Bayonne, la reine douairière d’Espagne trancha toute difficulté, et la traita comme déjà mariée et comme princesse des Asturies. Elle s’appuyoit sur l’exemple de Mme la duchesse de Bourgogne, que, par même raison de couper court à tout, le roi traita et la fit totalement jouir du même rang que si elle eût déjà été mariée. Vint après Mlle de Beaujolois, aussi fille de M. le duc d’Orléans, allant épouser l’autre infant. Sur l’exemple que je viens de rapporter, elle fut traitée de même ; mais la duchesse de Duras qui étoit chargée de sa conduite, et qui avoit mené avec elle la duchesse de Fitz-James sa fille, depuis duchesse d’Aumont, ne se trouva point, ni sa fille, à cette séance, parce qu’elle n’avoit pas eu ordre de vivre autrement avec Mlle de Beaujolois qu’avec une princesse du sang, et laissa auprès