Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/40

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seule fois que je l’avois vue, lorsque M. du Maine m’y mena, rue Saint-Avoye, dans la maison d’emprunt du premier président où ils logeoient au retour du roi de Vincennes à Paris, et depuis encore à M. le comte de Toulouse. Mme la duchesse d’Orléans me parut étonnée, néanmoins reçut bien mon compliment, avoua se souvenir très bien de tout ce que je lui alléguois, et n’osant trop s’émouvoir contre nous en ma présence, se lâcha contre les princes du sang. Je n’étois pas là pour la contredire, moins encore pour approuver sa déclamation ; je pris le parti du silence. Après qu’elle se fut exhalée, nous ne laissâmes pas de causer d’autre chose à l’ordinaire ; il lui vint du monde, j’en pris occasion de me retirer.

Les députés à M. le duc d’Orléans nous rapportèrent qu’ils en avoient été fort bien reçus. Je ne sais plus qui de nous se chargea de rendre compte à M. le Duc de ce que nous venions de faire, qui en parut fort aise. Nous ne fîmes là-dessus aucune civilité aux bâtards ; mais comme mon rang me plaçoit nécessairement en tous les conseils auprès du comte de Toulouse, avec qui j’étois là et chez Mme la duchesse d’Orléans fort librement, où je le rencontrois souvent, je lui en fis, en entrant au premier conseil, une civilité personnelle qu’il reçut honnêtement. Je n’en fis aucune au duc du Maine, qui néanmoins me salua fort civilement à son ordinaire, et moi lui, sans nous approcher. Pour M. le duc d’Orléans, je lui parlai fortement, tant sur les princes du sang que sur les pairs contre les bâtards. Je lui ramenteus [1] tout ce que lui-même m’avoit dit du temps du feu roi sur leurs différentes apothéoses, à mesure que le feu roi les avoit déifiés par degrés, et je ne lui laissai pas oublier les horreurs inventées, et sans cesse répandues et renouvelées, contre lui par le duc du Maine, où il avoit fait entrer Mme de Maintenon, et par elle en avoit persuadé le roi et tout ce

  1. Rappelai.