Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/102

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Zinzendorff lui avoit souvent parlé des cabales qui se formoient contre lui, et vouloit, sur ce qu’il avoit tiré de ce ministre et de quelques autres à Vienne, qu’il étoit de l’intérêt de l’empereur de soutenir ceux du régent, dont les ennemis attachés aux maximes du gouvernement précédent vouloient exciter des brouilleries dans l’Europe, et réunir ensemble les deux monarchies de France et d’Espagne ; que l’unique moyen de s’y opposer étoit une union étroite entre l’empereur et le régent, qui lui donnât courage et force nécessaire d’anéantir ses ennemis qui étoient aussi ceux de l’empereur, et c’étoit, disoit-il, l’avis de Zinzendoff. Stairs, sous une apparente affection, avoit souvent tenu les mêmes langages. Il s’étonnoit de la douceur et de la patience du régent, qui, à son avis, s’il avoit un procès devant le conseil de régence ne l’y gagneroit pas. Lui et Saint-Saphorin, par qui la négociation passoit, tâchoient d’inspirer, à Vienne, l’opinion du peu d’autorité du régent, en quoi ils ne pouvoient se déguiser leur mensonge, surtout Stairs qui étoit sur les lieux. Koenigseck n’étoit chargé de rien que du cérémonial. L’empereur vouloit qu’il obtint les mêmes distinctions dont jouissoit le nonce, mais avec un ordre secret de s’en désister s’il ne pouvoit soutenir cette prétention sans se mettre hors d’état de traiter les affaires dont il pourroit être chargé.

La cour de Vienne, embarrassée dans la guerre de Hongrie, avoit une grande inquiétude que l’entreprise d’Espagne ne se bornât pas à la Sardaigne. L’Angleterre, qui lui trouvoit trop d’ennemis, ne se pouvoit persuader que le roi de Sicile ne fût du nombre par son intérêt et par celui de l’Espagne, qu’on n’imaginoit pas pouvoir s’en passer ; et les ministres du roi d’Angleterre ne se pouvoient rassurer sur les réponses constantes que La Pérouse, ministre de ce prince à Londres, faisoit à leurs questions. Les ministres allemands de Georges, aussi ardents que ceux de l’empereur, ne cessoient de le presser d’aider ce prince et de hâter le départ