Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

arrêter à Staden deux François, qui étoient à Ragotzi : Charrier, son écuyer ; l’autre avoit pris le nom de comte de L’Hôpital. Welez informa Koenigseck du départ de Ragotzi, de la route qu’il avoit prise, et des détails les plus précis, avec des réflexions qui donnoient au régent toute la part de ce dessein, et tous les secours pour l’exécution. Ses preuves étoient que Ragotzi ayant permis au jeune Berzini d’aller joindre son père dans l’armée des Turcs, son rang de colonel et ses appointements lui étoient conservés au service de France. Welez sut positivement le jour que Ragotzi arriva à Marseille, la maison où il logeoit, ses conférences avec l’envoyé turc, le vaisseau qu’il devoit monter, et qu’il lui avoit été préparé par ordre du comte de Toulouse, d’où il concluoit qu’il n’y avoit pas lieu de douter des secours et des intentions de la France contre l’empereur. Cet homme se persuada que le prince Ragotzi ne continueroit pas son voyage à Constantinople, lorsqu’il apprendroit la victoire et les conquêtes des Impériaux en Hongrie, et se flatta bien à son retour de ne pas manquer son coup, pour en délivrer l’empereur, et se procurer les grâces sans nombre qui lui étoient promises. Il crut en même temps que l’empereur voudroit que le coup fût précédé ou suivi de quelques plaintes au régent. Il offrit de fournir telles preuves qu’on pourroit désirer pour justifier que le régent étoit pleinement informé des desseins de ce prince, et par conséquent qu’il avoit manqué à la parole qu’il avoit donnée là-dessus à Penterrieder, pendant que ce secrétaire étoit à Paris.

Cependant l’empereur écoutoit les propositions faites par l’Angleterre, et avoit promis de faire partir dans un mois Penterrieder, pourvu que l’abbé Dubois se rendît en même temps à Londres. Il doutoit néanmoins toujours des véritables intentions du régent. Il se proposoit de les examiner de près, par la conduite qu’il tiendroit sur le mouvement des Espagnols vers l’Italie. Il ne prétendoit s’engager qu’autant qu’il trouveroit ses avantages, et ne se pas contenter de