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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/128

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frère étoit à Vienne, lequel prétendoit traiter directement avec l’empereur indépendamment de ses ministres, et qui assuroit avoir bonne opinion de cette négociation.

L’envoyé, son frère, fondoit ses espérances sur ce que l’empereur savoit que le roi de Sicile avoit constamment refusé toute ligue nouvelle avec le régent, qu’il avoit répondu que les engagements déjà pris suffisoient, et que cette réponse lui avoit attiré la haine et les soupçons du régent ; que de là l’empereur inféroit que le régent lui seroit toujours contraire, et que, si ce prince témoignoit tant d’empressement pour empêcher le renouvellement de la guerre dans l’Europe, ce n’étoit pas par aucun attachement pour lui qu’il craignoit et n’aimoit point, mais pour empêcher la réunion que cette guerre produiroit infailliblement entre lui empereur et le roi de Sicile ; que c’étoit le motif du voyage de l’abbé Dubois à Londres ; que l’intelligence étoit parfaite entre le roi d’Angleterre et le régent ; qu’on savoit que le projet du roi d’Espagne, qui venoit de la reine, étoit, pour assurer la Toscane à la maison de Parme, d’y joindre le royaume de Sardaigne, et d’en tirer un titre pour faire porter au duc de Parme celui de roi de Sardaigne.

Quel que fût le projet, tous les princes d’Italie craignoient également d’être soupçonnés d’y participer. Leurs ministres en France le désapprouvoient publiquement, et ne cessoient de dire que leurs maîtres étoient bien éloignés d’entrer dans aucun projet capable de porter le moindre préjudice à l’empereur.

Cellamare étoit témoin de ces apologies continuelles, et très inquiet du voyage de l’abbé Dubois à Londres. Mais c’étoit un homme sage, qui espéroit peu de l’entreprise d’Espagne, et qui croyoit que le mieux, pour le roi son maître, seroit de suivre la voie que la France et l’Angleterre lui ouvroient pour entrer en négociation avec l’empereur.

Une guerre sans alliés lui paraissoit téméraire, et c’étoit,