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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/224

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qu’il alléguoit n’étoient pas suffisants ; que, pour l’amour de lui, il avoit essuyé tant de désastres, surtout pour sa promotion au cardinalat, qu’il n’avoit pas résolu d’exposer davantage sa conscience pour le favoriser. Mais comme il sentoit qu’il n’étoit pas politique de perdre le fruit de tout ce qu’il avoit fait pour lui, et de s’aliéner le maître et le dispensateur de toutes choses en Espagne, content d’un refus pour plaire à l’empereur, il fit dire à Albéroni que tout ce qu’il pouvoit faire étoit de lui accorder la permission de s’absenter six mois l’année de son église ; que la disposition des conciles lui en permettoit l’absence autres six mois, et que, par cet expédient si heureusement trouvé, il auroit ce qu’il demandoit de n’y point aller du tout. Ainsi, dans ce temps, on pouvoit alléguer les conciles pour dispenser un évêque de six mois par an de résidence ; mais Rome regardoit comme une erreur et comme une offense à la personne et à la dignité du pape de parler de concile quand il s’agissoit de la constitution.

Quelque sujet qu’il eût d’être satisfoit du zèle aveugle et emporté que témoignoient pour son autorité et pour la plénitude de sa toute-puissance plusieurs évêques françois, il craignoit toujours dans leurs écrits quelque marque de leur prévention pour l’autorité de l’Église universelle, soit assemblée, soit dispersée. Rome eût regardé comme un grand manque de respect et comme une erreur punissable si les évêques eussent dit que la constitution faisoit loi et obligeoit les fidèles parce qu’elle avoit été reçue dans l’Église, comme si, disoit cette cour, la cause nécessaire qui produisoit cet effet étoit l’acceptation de l’Église. Rome craignoit toujours ce qu’elle appeloit les maximes et les phrases françaises, et plus encore la frayeur des prélats françois vendus à Rome de s’exposer aux attaques des parlements.

Bentivoglio, dont les furieuses folies pour mettre tout à feu et à sang en France pour hâter sa promotion faisoient demander aux plus attachés à Rome un nonce plus traitable