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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/301

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tout ce qui regarderoit les matières de Rome, le cardinal de Noailles et les jésuites et les croupiers des deux partis.

J’eus lieu d’être plus content de Law. Depuis que le duc de Noailles n’eut plus les finances, ce fut à Law à qui j’eus affaire pour la Trappe et pour Septfonts ; il me facilita tout de la meilleure grâce du monde. Les payements coulèrent régulièrement. J’avois soin à chacun de faire la part de Septfonts, et j’eus celui de faire ensuite comprendre cette abbaye dans un supplément que j’obtins du régent pour la Trappe, qui, pour le dire tout de suite, eut en tout quarante mille écus, et Septfonts plus de quatre-vingt mille livres, ce qui sauva ces deux saintes maisons d’une ruine certaine et imminente, et les rétablit. Quelque mal et sans mesure que je fusse avec le duc de Noailles, je ne crus pas devoir oublier qu’il étoit le premier auteur de cette excellente œuvre, et la part qu’il prenoit en l’abbaye de Septfonts. Toutes les fois donc que je recevois un payement de Law, je tirois le duc de Noailles à part au premier conseil de régence. Je lui disois ce que je venois de recevoir, et le partage que j’en venois de faire. Il me remercioit, me faisoit des révérences, et je ne lui parlois ni ne le saluois jusqu’au prochain payement. Ces colloques, quoique courts et rares, devinrent la surprise des spectateurs et la matière des spéculations. À la première fois on nous crut raccommodés. Dans la suite, on ne sut plus que penser. J’en riais et laissois raisonner. L’abbé de Septfonts se trouvoit à Paris : c’étoit à lui que j’envoyois sa part. Il ne s’étoit pas douté du supplément de la Trappe. Il l’apprit par ce que je lui en envoyai : à quoi il ne s’attendoit pas, et dont il fut fort touché. Ce commerce nous fit faire connoissance ensemble, qui bientôt devint une tendre et réciproque amitié. C’étoit un saint bien aimable. J’aurois trop de choses à en dire ici ; elles se trouveront dans les Pièces à la suite de ce qui regarde M. de La Trappe.

Le chancelier de Pontchartrain fit le mariage de Maurepas, son petit-fils, avec la fille de La Vrillière, chez qui il logeoit,