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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/33

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sa charge ; fort obligeant, très considéré du parlement qui avoit souvent recours à ses lumières en beaucoup d’occasions, et qui avoit au dehors et parmi les seigneurs et à la cour beaucoup d’amis.

M. le prince de Conti perdit un fils enfant, qui étoit appelé comte de La Marche, dont le roi prit le deuil pour huit jours.

Courson, fils de Bâville, intendant ou plutôt roi de Languedoc, ne ressembloit en rien à son père. On a vu en son lieu qu’il pensa plus d’une fois être assommé à coups de pierres en divers lieux de son intendance de Rouen, dont il fallut l’ôter tant il s’y étoit rendu odieux, mais le crédit de son père le sauva et le fit envoyer intendant à Bordeaux. C’étoit dehors et dedans un gros boeuf, fort brutal, fort insolent et dont les mains n’étoient pas nettes, ni à son exemple celles de ses secrétaires qui faisoient toute l’intendance, dont il étoit très incapable, et de plus très paresseux.

Il fit, entre autres tyrannies, des taxes sèches [1] très violentes dans Périgueux, par ses ordonnances en forme, sans aucun édit ni arrêt du conseil ; et voyant qu’on ne se pressoit pas d’y satisfaire, les augmenta, multiplia les, frais, et à la fin mit dans des cachots des échevins et d’autres honnêtes et riches bourgeois. Il en fit tant qu’ils députèrent pour porter leurs plaintes, et allèrent de porte en porte chez tous ceux du conseil de régence, après avoir été plus de deux mois à se morfondre dans les antichambres du duc de Noailles.

Le comte de Toulouse, qui étoit homme fort juste, et qui les avoit entendus, blessé de ce qu’ils ne pouvoient obtenir de réponse, m’en parla. J’en étois aussi indigné que lui. Je lui répondis que s’il vouloit m’aider nous aurions raison de cette affaire. J’en parlai à M. le duc d’Orléans, qui n’en savoit

  1. Qui se payaient argent comptant.