Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/370

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Pendant que le roi d’Angleterre se préparoit à des guerres étrangères, la division continuoit à régner dans sa famille. Nulle négociation n’avoit pu lui réconcilier le prince de Galles ; il crut donc devoir employer d’autres moyens pour le soumettre. Il lui fit déclarer par Copper, chancelier d’Angleterre, le duc de Kingston et le comte de Stanhope, que, sur les cent mille livres sterling qui lui étoient assignées pour la dépense de sa maison, il lui en retranchoit quarante [mille], sous prétexte de la dépense que le roi s’obligeoit de faire pour la subsistance des enfants du prince. En même temps Georges fit passer en parleroient qu’on payeroit à l’empereur cent trente mille livres sterling pour reste des subsides de la dernière guerre, moyennant une quittance générale de toutes ses prétentions. Ainsi la cour de Vienne profitoit de tout. Elle étoit sûre des ministres confidents de Georges, hanovriens et anglois, et recherchée par le roi de Sicile qui ne songeoit qu’à apaiser sa colère, et ne croyoit d’alliance solide qu’avec elle. Il agissoit en même temps à Paris et à Londres comme ne voulant se conduire que par les médiateurs. Il se plaignoit de temps en temps du mystère qu’ils lui faisoient de l’état de la négociation. Provane s’en plaignoit encore davantage, et protestoit que son maître n’écouteroit jamais aucune proposition d’échange du royaume de Sicile. Il voulut se figurer que le régent ne seroit jamais favorable à son maître, parce que Son Altesse Royale avoit lieu de croire que, le cas arrivant, le roi de Sicile aideroit le roi d’Espagne à monter sur le trône de France, espérant lui-même monter sur celui d’Espagne ; et prétendit avoir appris par la comtesse de Verue que le régent traitoit le mariage de M. son fils avec l’infante de Portugal, où on s’alarmoit des préparatifs de l’Espagne, et où l’envoyé d’Angleterre ne parloit que de guerre et offroit des secours, si l’Espagne l’attaquoit. Albéroni calma bientôt cette inquiétude par les assurances positives qu’il y donna, et qu’il en reçut, du désir réciproque de demeurer en bonne intelligence. Il retira même les troupes