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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/393

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principaux ministres de Georges, soit pour donner plus de poids aux insinuations qu’il faisoit de temps en temps au cardinal Albéroni, mais toujours en tremblant pour le porter à la paix : II étoit persuadé que ce cardinal ne la désiroit pas, dont la preuve étoit le silence qu’il gardoit à son égard, à lui qui étoit le seul ministre du roi d’Espagne à portée de veiller à la négociation ; et de ménager les intérêts du roi son maître. Il falloit pour y réussir qu’il fût instruit de ses intentions, et il les ignoroit absolument ; en sorte que Stanhope le pressant pour savoir enfin ce que Sa Majesté Catholique demandoit, il étoit obligé de répondre en termes généraux, et de se servir de son esprit pour cacher le peu de confiance que sa cour avoit en lui. Il étoit instruit néanmoins de ce qui se passoit, mais par Stanhope et par Dubois. Cet abbé l’assuroit que le régent communiqueroit tout au roi d’Espagne ; que c’étoit le principal objet de la, mission de Nancré ; qu’il agiroit à Madrid d’un parfoit concert avec Albéroni ; et que, jusqu’à ce qu’il sût par lui les intentions du roi d’Espagne, le régent différeroit de consentir au projet qui lui étoit proposé par les Anglois. Voulant donner à Monteléon une preuve de la confiance qu’il prenoit en lui, il lui dit qu’il reconnoissoit en tout la partialité des ministres hanovriens et des Anglois de leur parti pour la cour de Vienne ; qu’il remarquoit qu’ils oublioient souvent leurs intérêts pour favoriser celui de l’empereur. Il excitoit Monteléon à redoubler ses assiduités auprès de Stanhope, pour animer davantage son penchant pour l’Espagne. Désirant disposer Albéroni favorablement pour Nancré, il pria l’ambassadeur d’en écrire à ce premier ministre en termes qui le disposassent favorablement pour la négociation, et le prévinssent en faveur du négociateur. Il parut même qu’il craignit de s’en rapporter à lui, car il lui envoya par Chavigny le modèle du billet qu’il le pria d’écrire à Madrid, et pour plus de sûreté, de lui en renvoyer la minute. Ce billet étoit conçu dans les termes suivants :