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PORT-ROYAL.

ancien ami : « J’ai facilement, disait-il, supporté cela d’un homme qui m’avoit honoré dès longtemps de son amitié et qui étoit dans Paris en créance d’un parfaitement homme de bien, laquelle on ne pouvoit entamer sans blesser la charité : il m’est seulement resté cette admiration dans l’âme que Vous, qui faites profession d’être si doux et si retenu partout, ayez pris sujet d’un soulèvement qui s’est fait contre moi par une triple cabale, et pour des intérêts assez connus, de me dire des choses que vous n’eussiez osé penser auparavant ; et qu’ainsi, au lieu que je devois attendre de la consolation de vous, vous ayez pris de là une hardiesse extraordinaire, contre votre inclination et coutume, de vous joindre aux autres pour m’accabler ; ajoutant cela de plus aux excès des autres, que vous avez entrepris de me le venir dire à moi-même dans mon propre logis, ce que nul des autres n’avoit osé faire. »

Sans entrer ici dans le détail et la discussion de cette lettre, il ressort, en effet, pour moi d’un examen impartial, que M. Vincent, de bien plus de cœur et de charité que de spéculation dogmatique et de doctrine, s’était monté ou laissé monter un peu vite, lors de la clameur commençante, contre trois ou quatre opinions rigoureuses de M. de Saint-Cyran[1], et qu’il était venu lui en parler avec plus de vivacité peut-être qu’il ne convenait à un homme si charitable, à l’égard d’un ami alors si attaqué ; qu’il y avait mêlé d’autres paroles relatives à d’anciens avis de M. de Saint-Cyran sur sa Congrégation ; que celui-ci y avait cru voir une sorte d’oubli d’anciens services ; et il en avait rendu beaucoup à M. Vincent au début de cette Congrégation, usant de son crédit près de M. Bignon, près des évêques, écrivant

  1. Celle-ci, par exemple, « que la pénitence différée jusqu’à l’heure de la mort reste fort douteuse. »