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PORT-ROYAL.
pas tout d’abord que l’affaire de Jansénius fut reprise et poursuivie[1].
Cela revint par la France. En juillet 1649, le syndic
- ↑ Nous avons sur ces premiers temps d’Innocent X, et sur son caractère, avant qu’il eût pris parti, de curieux renseignements chez un des nôtres, et des renseignements que tout garantit judicieux et impartiaux. Je les tire des Négociations de l’abbé de Saint-Nicolas (Henri Arnauld), chargé d’affaires à Rome, non janséniste à cette époque, et tout occupé de suivre les instructions de Mazarin en faveur des Barberins. Dans sa dépêche du 10 juin 1646, l’abbé raconte ainsi sa première réception par le Pape : « Je me rendis au palais à l’heure marquée (vingt-et-une heures) ; je fus à l’instant introduit auprès du Pape. Il me reçut en la manière que je m’étois proposé qu’il feroit, c’est-à-dire avec un visage riant, des paroles étudiées, mais douces, obligeantes et accompagnées de toutes les démonstrations imaginables dont une personne est capable pour gagner l’esprit d’une autre ; mais j’étois tellement prévenu sur tout cela, qu’il fît certainement un effet tout contraire à celui qu’il avoit dessein de faire. Il ne me voulut point permettre de parler que je ne me fusse levé auparavant. Après lui avoir dit que je venois à ses pieds sur l’assurance que Messieurs les Ambassadeurs de Venise et quelques autres personnes m’avoient donnée, qu’il étoit très disposé à donner satisfaction à Leurs Majestés (le Roi et la Reine-Régente) ; lui avoir fait connoître que je ne mettois nullement en doute que je ne dusse remporter des effets de tant de paroles qu’il avoit dites sur cela, et quelques autres choses sur le même sujet, je lui présentai ma lettre de créance : après quoi il fut un peu de temps sans parler, en attendant la sortie de quelques larmes, qui ne me surprirent non plus que tout le reste, car je m’y étois attendu, aussi bien qu’à un grand tremblement de mains, ayant su que cela lui étoit ordinaire quand il parle d’affaires importantes. Puis il commença à me dire qu’il ne savoit à quoi attribuer son malheur de n’être pas cru aussi affectionné à la France qu’il l’étoit effectivement… » Et après tout un détail très-particulier d’affaires, l’abbé de Saint-Nicolas conclut ainsi : « La longueur du siège d’Orbitello lui donne du cœur et le confirme dans sa lenteur naturelle, qui est tout à fait espagnole. Au reste, sa manière de traiter est tellement pleine d’artifice, qu’il faut être bien précautionné pour ne pas s’y laisser prendre. » Le cardinal Mazarin, de son côté, par ses lettres, recommande bien à l’abbé, lorsqu’il ira à l’audience du Pape, de ne jamais se retirer de ses pieds sans lui