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LIVRE TROISIÈME.

Cornet que bien nous connaissons[1], avait dénoncé à la Faculté de Paris les fameuses Propositions extraites. Bien que l’entreprise n’eût pas eu d’abord plein succès et que, sur le rapport du conseiller Broussel, un Arrêt du Parlement eût supprimé le premier essai de censure, le signal et la méthode de l’attaque étaient donnés : on savait avec précision les points de mire.

Les Jésuites de Rome en relation suivie avec ceux de Paris, et particulièrement, dit-on, le Père Annat, futur confesseur du roi, écrivant au Père Dinet qui l’était alors, avertirent que, si on faisait demander la censure des Propositions par une portion du Clergé de France, on réussirait infailliblement auprès du pontife, qui serait jaloux de donner signe de souveraineté. M. Habertdonc, actuellement évêque de Vabres, et qui autrefois, étant théologal de Paris, avait prêché le premier contre le livre de Jansénius, travailla ses confrères les évêques, et dressa, de la part d’un grand nombre d’entre eux, une Lettre au Pape, requérant jugement sur les cinq Propositions. Le nombre des signatures alla graduellement de soixante et dix à quatre-vingt-cinq ; il est vrai qu’on y employa toutes sortes d’obsessions. Le bon M. Vincent (de Paul) ne s’y ménageait pas. Cette lettre de M. Habert, qui semblait émaner du corps entier de l’Épiscopat, et qui ne représentait réellement que des signatures individuelles, ne fut pas communiquée à l’Assemblée générale du Clergé dont la convocation tombait au commencement de l’année 1651. Aussi plusieurs évêques s’élevèrent-ils contre ce qu’ils appelaient une usurpation de

    redire un à un les points de contest, afin de faire voir qu’il ne se tient pas pour satisfait. Ajoutez encore, si vous le voulez, les renseignements de Retz sur ce Pape indécis, avare et fin. Les pauvres Jansénistes, une fois entre ses mains et à ses pieds, n’eurent guère de parti à tirer d’un tel juge.

  1. Précédemment, page 149 du tome deuxième (liv. II, chap. XI).