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LIVRE TROISIÈME.

courut, l’histoire ecclésiastique du temps l’a enregistré, et M. de Solminihac, qui n’avait d’ailleurs rien de janséniste, eut place au Nécrologe[1].

Tout ce respectable monde avait pris sans s’en douter une dose des Provinciales, et elle opérait.

La traduction que fit Nicole des Provinciales en latin sous le nom quelque peu flamand de Wendrock (1658), et les Dissertations théologiques qu’il y ajouta, eurent dans le même public, alors si considérable, un succès peut-être supérieur, je suis fâché de le dire, à celui des simples Lettres volantes. On assure que Nicole avait relu plusieurs fois Térence avant de la commencer ; c’était du moins comprendre la difficulté en homme d’esprit. Cette traduction popularisa véritablement le victorieux pamphlet en Europe. Les Universités des Pays-Bas et les savants en us de toute langue purent dorénavant goûter à leur manière, et sous une forme un peu plus compacte, ce qui avait si fort charmé madame de Sablé. Aussi les attaques contre le Montalte doublé de Wendrock en vinrent-elles aux dernières extrémités. Déjà des condamnations officielles s’étaient essayées en plus d’un lieu. Le 18 octobre 1657, on avait vu à Paris, avec indignation, le placard de la Congrégation romaine de l’Index contre les Provinciales, où elles étaient toutes nommées en particulier. Dans les premiers jours de mars de la même année, la Gazette (no 30) avait donné la nouvelle que le Parlement d’Aix venait de déclarer diffamatoires, calomnieuses et pernicieuses les dix-sept Lettres[2], et ordonné « qu’elles seroient brûlées par

  1. Dans le petit Nécrologe en sept volumes, rédigé au dix-huitième siècle. Le caractère distinctif du Janséniste en avançant s’y réduit à un point : être ennemi du Jésuite.
  2. À la date de l’Arrêt du Parlement d’Aix, il n’y avait que seize Lettres publiées ; mais on prit pour la dix-septième cette petite Lettre au Père Annat sur son Écrit qui a pour titre : LA BONNE