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PORT-ROYAL.

mer que Louis XTV en ait beaucoup profité, ni qu’il soit devenu un bien grand latiniste ; mais toute la génération qui était du même âge que lui, cette génération des Racine et des Despréaux, qui devait tant honorer le règne, se ressentit plus ou moins directement des Méthodes nouvelles ; et l’on peut dire sans exagération que rien ne contribua plus que l’enseignement de Port-Royal à concilier au sein de cette grande époque le solide avec le poli.

Aucun de ces Messieurs de Port-Royal n’était de l’Académie ; c’est bien à eux pourtant que revient l’honneur d’avoir mis l’enseignement en accord avec le progrès littéraire qu’accomplissait vers le même temps l’Académie, et d’avoir introduit les premiers la régularité et l’élégance du français dans le courant des Études savantes. Dérouiller le pédantisme sans ruiner la solidité, telle pourrait être leur devise.

L’Université n’en profita point aussi vite ni aussi complètement que la raison l’eût voulu. Rien n’est tenace comme l’esprit de routine dans les vieux Corps : on croit l’avoir vaincu ; il renaît à chaque pas, et recommence. Faut-il l’avouer ? en lisant le détail des recommandations et des conseils donnés par nos amis, en me pénétrant surtout de l’esprit qui y respire, j’ai été tout surpris de voir que, même de nos jours, l’Université renouvelée n’avait pas encore accepté quelques-unes de ces réformes le plus expressément indiquées dès lors, sur les thèmes par exemple, sur les vers latins, sur le mode d’explication des auteurs anciens. Aujourd’hui, comme en 1643, il n’est que trop vrai qu’on est censé trop souvent avoir terminé ses classes sans avoir lu, véritablement lu, les principaux auteurs anciens, et sans avoir appris à les aimer, à les désirer connaître. Quoi qu’il en soit, vers le dernier tiers du dix-septième siècle, une part notable des réformes demandées par Port-Royal commença à se