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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/581

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LIVRE QUATRIÈME.

gieuses, dont deux à Port-Royal ; deux de ses neveux étaient morts à La Trappe : famille de saints !

Le croirait-on ? en 1689, cet homme de Dieu, vivant de cette sorte, faillit être enveloppé dans la prétendue conspiration qui fit enfermer à Vincennes quatre chanoines de Beauvais, bientôt reconnus pour indignement calomniés et pour innocents : mais il en resta toujours un peu suspect. Poussant un jour son voyage de pèlerin jusqu'à La Trappe, en 1696, à l'âge de 75 ans, pour y embrasser, non plus ses neveux morts, mais le sous-prieur Dom Pierre Le Nain, frère de M. de Tillemont, et comme lui son ancien élève, lequel à diverses reprises avait témoigné le désir de le revoir encore, M. de Beaupuis ne put y parvenir ; et, malgré les instances qu'il lit faire auprès du Père Abbé (de Rancé), il dut reprendre son bâton de route sans avoir dit à son ancien ami le suprême adieu, sans même qu'on lui eût donné une raison du refus. Il repassa par Port-Royal, affecté au cœur, et s'en alla à Tillemont conter toute l'affaire à M. de Tillemont même. Celui-ci fut extrêmement surpris ; mais il demeura cependant à son ordinaire dans une grande retenue, pour ne juger absolument ni ne condamner particulièrement le Père Abbé. Le voyez-vous, la balance de l'équité et de la critique à la main ? M. de Tillemont la portait en toute chose. Il résulta de l'explication qui eut lieu entre lui et M. de Rancé (nous y reviendrons), que ce dernier avait défense de la Cour de recevoir dans sa maison M. de Beaupuis suspect. Quoi qu'on puisse dire, M. de Rancé fut dur : Port-Royal


    son de Bénédictines près de Beaumont-sur-Oise , où ils ont des amies communes. En vérité, Monsieur, on ne respire que la bonne odeur de Jésus-Christ auprès de telles personnes, et l'on en demeure tout parfumé pour plusieurs jours ; soit qu'ils parlent dans la conversation, soit qu'ils prient à leurs heures réglées, on est pénétré de les voir et de les entendre. » (Lettre du 16 juillet 1697.)