« Ce ne sera pas cela, poursuit-il avec sa ferme ironie, qui prouvera qu’elle demeure en repos ; et si l’on avoit des observations constantes qui prouvassent que c’est elle qui tourne, tous les hommes ensemble ne l’empêoheroient pas de tourner, et ne s’empêcheroient pas de tourner aussi avec elle. » Et il finit par conclure que tout le monde étant d’accord pour condamner les Propositions, et le désaccord n’étant que sur le fait de savoir si elles sont textuellement dans un certain livre, simple fait appréciable par les sens et le jugement, tout ce bruit qu’on fait dans l’Église se fait pour rien, « pro nihilo, mon Père, comme le dit saint Bernard. » C’est à peu près par là que Pascal conclut ses Provinciales : Beaucoup de bruit pour rien, comme dans la comédie.
Or nous qui, sans être du métier, avons pourtant assisté jusqu’ici en amateur très-curieux à la formation première et aux origines du Jansénisme, nous pouvons déjà répondre à cette agréable légèreté : « Jansénius, quand il méditait si au long avec Saint-Cyran l’entreprise de Pilmot, la grande réforme intérieure et fondamentale, savait bien qu’il y aurait beaucoup de bruit et pour beaucoup de causes. »
Les adversaires à leur tour, quand ils furent revenus du premier coup de surprise (ce qui fut un peu long), ne restèrent pas sans réponse, et dans le livre intitulé Histoire des cinq Propositions de Jansénius (1700), l’auteur anonyme (l’abbé Dumas) oppose à cette portion des Provinciales plusieurs remarques assez judicieuses. Du temps de Pascal et au moment où ses Lettres parurent, les Molinistes triomphaient ; il était juste d’entendre la défense, de prêter l’oreille à l’accusé ; et cela devint non-seulement si juste, mais si agréable et si décidément victorieux, qu’il devient juste aujourd’hui d’entendre quelques réponses des adversaires, dussent-elles paraître beaucoup moins agréables.