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ÉPITRE DEUXIÉME.

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Le peuple romain put croire autrefois que le hasard dispensait les royaumes[1], les empires et tout ce que désirent les avides mortels : d’autant plus que ces biens semblaient souvent, comme par caprice, distribues aux hommes les moins dignes ; et que nul n’avait pu les conserver sans mélange. Mais l’événement a démontré ce que dit Appius dans ses poésies, que chacun est l’artisan de sa fortune. Tu en es surtout la preuve, ô César ; toi qui as surpassé de si loin les autres hommes, qu’ils se lassent plutôt de louer tes actions que toi de faire des actions dignes de louange.

Mais les biens conquis par le courage, non moins que les ouvrages de l’industrie, exigent, pour être conservés, une grande activité : l’incurie les dégrade, ils s’écroulent faute d’appuis. Nul, en effet, ne cède volontairement l’empire à un autre : et quelles que soient les vertus et la clémence de celui qui exerce le pouvoir suprême, on le craint toutefois, parce qu’il peut, s’il le veut, être méchant. Cela vient de ce que le plus souvent les hommes investis

  1. Je suis ici la leçon donnée par les anciennes éditions. Des éditions postérieures, les unes suppriment les mots populus romanus, ce qui altère peu le sens ; les autres omettent les mots pro vero. Il faudrait dans ce dernier cas traduire. ainsi : « Le peuple romain dispensait autrefois, etc. » Mais ce sens se lie avec tout ce qui suit.