Page:Salverte - Essais de traductions, Didot, 1838.djvu/65

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s’étaient rendus tes ennemis[1]. D’autres furent entraînes par des liaisons de parenté, ou par quelque attachement personnel ; car personne ne partageait sa puissance ; et s’il avait pu souffrir un égal, la guerre n’eût point ébranlé l’univers. Quant au reste, tourbe cédant à l’habitude plus qu’au discernement, chacun a suivi, comme le plus sensé, celui qui marchait devant lui.

A la même époque, induits par des bruits calomnieux à espérer qu’ils envahiraient la chose publique, des hommes tout souillés de débauches et d’opprobres, venaient en foule grossir ton armée, et menaçaient ouvertement le citoyen paisible de la mort, du pillage, en un mot de toutes les violences que leur inspirait un cœur corrompu. La plupart d’entre eux t’ont depuis abandonné, voyant que tu ne voulais ni prononcer l’abolition des dettes, ni traiter les citoyens en ennemis. Quelques-uns demeurèrent dans ton camp ; ils y devaient trouver plus de tranquillité qu’à Rome, où s’apprêtaient à fondre sur eux tant de créanciers.

Mais il est impossible de dire et quels citoyens, et combien, par un motif semblable, se retirèrent ensuite vers Pompée ; et tout le temps de la guerre, restèrent près de lui, comme dans un asile sacré, inviolable, ouvert à tous les débiteurs.

  1. « Qui, pour leur malheur étaient tes ennemis. » (Beauzée.) Tous les ennemis de César le furent pour leur malheur. « Quelques-uns furent entraînés par des ressentiments personnels contre toi. » (Dureau de la Malle). Je n’admets pas que Salluste reproche ici à son protecteur de s’être attiré des ennemis par des torts personnels. Per suam injuriam doit signifier ici l’injustice qu’on a faite et non celle qu’on a soufferte. Salluste sert bien son protecteur, lorsqu’il accuse les partisans de Pompée de n’avoir pris les armes que parce qu’ils craignaient le ressentiment de César, dès longtemps offensé par eux. Debrosses traduit en ce sens : « Qui se déclarèrent contre vous, parce qu’ils vous avaient offensé. »