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Page:Salverte - Essais de traductions, Didot, 1838.djvu/89

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l’appui des tribuns du peuple, il inspira à la multitude le désir d’un changement dont il devait profiter. La soif de la domination excitait, à cette époque, des luttes fréquentes entre le sénat et le peuple. Voyant dans Marius le fléau des nobles, qu’il déchirait par de continuelles invectives, le peuple l’éleva à de nouveaux honneurs. Réuni aux comices pour l’élection des consuls, il le choisit unanimement ; et arrachant à Métellus la Numidie, assigna cette province au nouveau consul.

Marius, revêtu du consulat, s’en parait comme de la dépouille des vaincus, aux yeux des sénateurs abaissés, et se déclarait ouvertement l’adversaire de leur puissance. Pour recruter son armée, il osa le premier[1] enrôler des prolétaires, des citoyens sans garantie personnelle, et jusqu’alors sans valeur dans l’État. Ainsi, aux dépens de l’intérêt public, il se montrait reconnaissant envers la multitude qui, secondant son espoir, l’avait élevé aux honneurs. Car les citoyens de Rome étaient divisés par classes, et recensés suivant la valeur de leur patrimoine. Tous les propriétaires servaient dans l’armée. Ils combattaient énergiquement pour la victoire, ceux qui avaient en même temps à défendre leur patrie, leurs biens et leur liberté[2]. Ceux, au contraire, qui n’avaient point de propriétés, n’entraient dans le cens que pour leur personne, le seul bien qu’ils possédassent. En temps

  1. Ne faut-il pas lire : primus omnium ? Marius fit alors ce qu’aucun chef n’avait osé avant lui. J’ai traduit en ce sens.
  2. Ici le texte est altéré : j’y ai suppléé de la manière qui m’a paru la plus plausible.