Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/30

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l’indigo ; mais combien de vies leur ont été sacrifiées, combien de meurtres leur culture a demandés, combien de crimes il a fallu commettre pour en diminuer la valeur. Nos colonies exportent annuellement pour 126,000,000 livres ; elles tirent d’Afrique 36,000 nègres, ajoutez-en plus de 100, 000 qui meurent en défendant leur liberté, ou qui préfèrent la mort à l’esclavage, et vous verrez que chaque millier de sucre importé en France coûte la vie d’un homme, sans compter tout ce que souffrent les malheureux qui sont occupés à le cultiver ! »

Frossard écrivait en 1788. Schoell, moins exalté que lui il est vrai, ne fait monter, dans son Abrégé des Traités de paix, article du congrès de Vienne, qu’à trente millions le nombre d’hommes enlevés à l’Afrique par la traite. Mais qui ne serait encore épouvanté de la proportion de ce minimum ?

C’est pourtant en face de telles considérations qu’on a osé dire « que si je prenais la peine d’examiner une habitation bien administrée, je verrais que ces êtres, objets de tant de sollicitude, sont loin d’être aussi à plaindre qu’on ne cesse de le représenter. » Et puis effectivement on nous les a fait voir, « heureux[1], jouissant d’une aisance et d’un bien-être inconnus, ayant de bonnes cases, de beaux jardins avec des volailles et du bétail, dont

  1. Encore M. F. P.