Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/166

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et, dans le récit sommaire qu’il faisait chaque soir à mon aïeule de l’emploi de la journée, il mentionna cette visite projetée d’Amschel Rothschild. Il n’avait pas prévu le soulèvement d’indignation qu’il provoqua. Quoi ! ce malheureux fils de juif allait venir en sa maison, il allait entrer dans la chambre de sa belle-fille, toucher de ses mains, peut-être, le berceau chrétien de son petit-fils ! Cette pensée la mettait hors d’elle-même, et il ne fallut rien de moins que l’accord de toute la famille pour la réduire à supporter ce changement des temps et cette incroyable diminution de la fierté chrétienne dans sa propre famille !

L’obstination du préjugé francfortois contre les juifs avait de quoi surprendre dans une population qui d’ailleurs était extrêmement cultivée.

Comme dans tous les pays protestants, la culture et le désir du progrès descendaient dans Francfort jusqu’au plus bas des couches populaires. Le gouvernement municipal, où les artisans avaient part et qui se renouvelait fréquemment par l’élection, n’était pas sans quelque analogie avec l’État florentin. Comme à Florence, on avait à Francfort le goût des arts, on honorait la science ; on fréquentait le théâtre. Les fêtes du couronnement avec leurs pompes tradition

    de la maison, frère du baron James, du baron Charles, du baron Salomou et de Nathan de Rothschild.