Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/321

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

thétique, comparable à ce qu’était la Malibran dans Desdemona ; un éclat de virtuosité, de jeunesse, de force et de fraîcheur qui puisse égaler mademoiselle Sontag dans Rosine du Barbier.

L’enthousiasme était universel. Cependant les compositeurs et les chanteurs gardaient encore une place à part ; ils ne paraissaient dans les salons, en dépit de l’empressement qu’on mettait à les y avoir, que d’une manière subalterne. Voulait-on, par exemple, donner un beau concert, on s’adressait à Rossini, qui, moyennant une somme convenue, assez minime, quinze cents francs, si j’ai bonne mémoire, se chargeait du programme et de son exécution, ôtant ainsi aux maîtres de maison tout embarras du choix, tout ennui des répétitions, etc. Le grand maestro tenait le piano toute la soirée. Il accompagnait les chanteurs. D’ordinaire il leur adjoignait un virtuose instrumentiste : Herz ou Moschelès, Lafon ou Bériot, Nadermann, le premier harpiste, Tulou, la première flûte du roi, ou la merveille du monde musical, le petit Liszt. Tous ensemble ils arrivaient à l’heure dite, par une porte de côté ; tous ensemble ils s’asseyaient auprès du piano, tous ensemble ils repartaient, après avoir reçu les compliments du maître de la maison et de quelques dilettanti de profession. Le lendemain on envoyait à

    de la Pasta, s’écriait un jour : « Quel malheur que cette femme-là s’obstine à chanter ! »