Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/139

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qui eut dès lors à soutenir contre des adversaires que l’évangile avait été rédigé par Jean, n’invoque, ni à l’occasion de cette polémique, ni nulle part dans son volumineux ouvrage, l’autorité imposante de l’homme apostolique[1]. Sans savoir si le quatrième évangile portait dès le commencement le nom de l’apôtre Jean, nous le rencontrons d’abord chez les Valentiniens et les Montanistes, vers le milieu du iie siècle ; et dès lors il est repoussé par les hérétiques appelés Aloges, qui rejetaient l’évangile de Jean et l’attribuaient à Cérinthe, soit parce que les Montanistes y avaient puisé l’idée de leur paraclet, soit aussi parce qu’il ne paraissait pas concorder avec les trois autres évangiles[2]. La première citation d’un passage de cet évangile, sous le nom de Jean, se trouve dans Théophile d’Antioche, vers l’an 172[3]. Ainsi les témoignages extrinsèques sont peu de chose en faveur du quatrième évangile ; et les théologiens actuels refusant à l’apôtre l’Apocalypse, qui n’est en rien plus mal autorisée, ne sont pas bien venus à faire grand fracas de l’authenticité de l’évangile ; c’est ce que Tholuck remarque de son côté[4]. Enfin la présence, à Éphèse, de deux Jean, l’apôtre et le prêtre, est une circonstance qui est loin d’avoir été suffisamment comparée aux plus anciens témoignages pour l’attribution, à Jean, de l’Apocalypse d’une part, et, d’autre part, de l’Évangile et des Lettres.

Ainsi les plus anciens témoignages nous disent, tantôt qu’un apôtre ou un homme apostolique a écrit un évangile, mais non si c’est l’évangile qui plus tard a eu cours dans l’Église sous son nom ; tantôt qu’il existait de semblables écrits, mais non que ces écrits étaient attribués avec précision à un certain apôtre ou compagnon d’un apôtre. Et cependant, avec toute leur indécision, ces témoignages ne vont pas

  1. De Wette, l. c.
  2. De Wette, 1. c. ; et Gieseler, K. G., 1, S. 154.
  3. Ad. Autol., 2.
  4. Glaubwürdigkeit, S. 283.