Page:Strauss David - Vie de Jésus, tome 1, Ladrange 1856.djvu/190

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intelligences fait pour le nôtre, c’est justement de susciter des intelligences humaines extraordinaires, et non de faire monter et descendre des anges.

Si enfin, défendant la signification littérale des chapitres de Luc, on prétend que l’ange dut tracer d’avance le plan d’éducation pour l’enfant qui allait naître, afin que cet enfant fût un jour l’homme qu’il devait être[1], ce serait, ou faire une trop forte supposition, à savoir, que tous les grands hommes, pour devenir tels par leur éducation, ont dû être introduits de cette façon dans le monde ; ou s’engager à prouver pourquoi ce qui ne fut pas indispensable pour les plus grands hommes d’autres nations et d’autres siècles, a été nécessaire pour Jean-Baptiste. En outre, une pareille explication attribuerait trop à l’éducation, et trop peu au développement interne de l’esprit. Enfin on a fait valoir avec raison que, bien loin d’aider à concevoir le récit évangélique comme un miracle réel, plusieurs circonstances subséquentes de la vie de Jean-Baptiste demeurent tout à fait inexplicables, si l’on suppose que de pareilles merveilles ont véritablement précédé et accompagné sa naissance ; car, s’il était vrai que, dès le début, Jean eût été marqué d’une façon si singulière, comme devant être le précurseur de Jésus, on ne comprend plus comment il ne l’a pas connu avant le baptême, et comment, plus tard encore, il a pu se tromper sur son caractère messianique (Joh., 1, 30 ; Matthieu, 11, 2)[2].

Ainsi il faudra donner raison à la critique et à la polémique des rationalistes, et tomber d’accord avec eux de ce résultat négatif, à savoir, qu’il ne peut être rien survenu d’aussi surnaturel avant et pendant la naissance de Jean-Baptiste. Maintenant on demande seulement quelle idée

  1. Hess, Geschichte der drei letzten Lebensjahre Jesu u. s. w., 1. Thl., S. 13, 35.
  2. Horst, dans Henke’s Museum, 1, 4, S. 733 f. ; Gabler, dans son Neuest. theol. Journal, 7, 1, S. 403.